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Lu ailleurs

Lu ailleurs / L’aventurisme des Etats-Unis d’Amnésie

Gian Pozzy

1 août 2017

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Les dirigeants américains adorent faire la leçon au monde, et notamment aux Chinois, à propos du «respect des règles de l’ordre international», sous-entendant que «les Chinois devraient se comporter un peu plus comme nous», écrit dans Global Viewpoint Network l’intellectuel Graham Allison, directeur du Belfer Center for Science and International Affairs de la Harvard Kennedy School.



Graham Allison en veut pour preuve les admonestations de Donald Trump et de son secrétaire à la Défense James Mattis au Céleste Empire, coupable selon eux de tenter d’établir sa souveraineté sur toute la mer de Chine méridionale. A fin mai, Washington avait même envoyé un destroyer narguer les Chinois dans les îles Spratleys.

«Or, constate Graham Allison, aux Etats-Unis d’Amnésie, rares sont les Américains à avoir une petite idée de la manière dont nous nous sommes comportés durant notre histoire.» Et de rappeler l’ère Theodore Roosevelt, président de 1901 à 1909. Roosevelt était convaincu que la grandeur des Etats-Unis reposait sur leur mission de faire progresser la civilisation chez eux comme à l’étranger. Avant même son accession à la Maison Blanche, encore secrétaire à la Navy, Roosevelt adjurait son prédécesseur McKinley de virer l’Espagne de Cuba. En 1898, faisant d’une pierre plusieurs coups, les Américains battent non seulement l’Espagne à Cuba mais la privent également de Porto Rico, de Guam et des Philippines.

En 1902, devenu président après l’assassinat de McKinley, Roosevelt avertit l’empereur allemand Guillaume II qu’il va «écrabouiller» ses navires de guerre s’ils ne lèvent pas immédiatement le blocus du Venezuela. C’est la mise en application de la Doctrine Monroe: MM. les Européens, pas touche à l’hémisphère Ouest! L’année suivante, quand la Colombie refuse sa proposition de creuser le canal de Panama (alors encore partie du territoire colombien), il soutient le mouvement d’autodétermination panaméen et envoie ses troupes à la rescousse des rebelles. Dès que le Panama a déclaré son indépendance, le canal se creuse et les Etats-Unis en négocient les droits «à perpétuité».

«Un pouvoir de police internationale»

Suite à une dispute territoriale avec le Canada, et donc l’impériale Grande-Bretagne, sur les frontières de l’Alaska, Roosevelt menace de déclarer la guerre. Comme le litige est soumis à une Cour internationale de justice, il avertit les Anglais que, si la décision ne lui est pas favorable, «les Etats-Unis se verront forcés d’agir d’une manière qui blessera forcément l’orgueil britannique». Autrement dit une guerre que la Grande-Bretagne perdra.

Dans son discours sur l’état de l’Union de 1904, Theodore Roosevelt explique que les Etats-Unis doivent exercer «un pouvoir de police internationale». Depuis cet appendice rooseveltien à la Doctrine Monroe, les troupes américaines sont intervenues vingt-et-une fois en Amérique latine au fil des trente années suivantes. Et les Etats-Unis n’ont guère cessé de le faire sous diverses formes (Cuba, Chili, Panama, Grenade, Salvador, Nicaragua) depuis lors.

Toute ressemblance avec les tweets d’un autre président à la toison jaune-orange est évidemment fortuite.



L’article de Graham Allison dans le Global Viewpoint Network: «China’s maritime provocations are nothing next to American adventurism»


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