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Actuel / Chômage: les chiffres ne disent pas tout


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En temps de crise la tentation est grande de chercher une raison de se réjouir. La Suisse en a trouvé une: le très bas taux de chômage (2,2%). Problème: son mode de calcul ne permet pas la comparaison avec les voisins. Il en est réalité plus haut.



Les critères du BIT (Bureau international du travail) utilisés dans l’UE définissent ce qu’est une personne au chômage. Elle est en recherche d’emploi. Le décompte suisse porte en revanche sur les bénéficiaires de l’assurance. Celles et ceux qui arrivent en fin de droits ou veulent reprendre une activité après une longue interruption ne figurent plus dans le calcul.

Il faut saluer la transparence de l’Office fédéral de la statistique. Il publie régulièrement les «vrais» chiffres pour la Suisse, calculés selon la règle du BIT. Ainsi, pour le troisième trimestre de 2022, les chômeurs représentaient 4,3% de la population, soit 212’000 personnes, 41’000 de moins qu’un an auparavant. Les femmes sont plus touchées que les hommes. Et pour les personnes étrangères le taux est plus du double.

C’est globalement moins que dans les pays voisins. Mais l’examen attentif des plus proches réserve des surprises. L’Allemagne en est à 5,4%, mais l’Etat du Baden-Württemberg en face de chez nous (11 millions d’habitants!) en est à 3,6% au sens du BIT, moins que la Suisse. La France va mieux mais reste en moins bon état: 7,3%. Mais le taux de chômage est à 5,4% en Haute-Savoie et 5,2% dans le Jura. 

La baisse du chômage notée partout doit modérément nous réjouir. Le BIT constate que dans nos pas, les personnes qui ont décroché à un moment donné, surtout pour de longues périodes, ont toutes les peines à reprendre pied dans le monde du travail. A commencer par les femmes qui se sont consacrées à leur famille et souhaitent ensuite travailler à nouveau. S’ajoutent les travailleurs en sous-emploi qui renoncent, découragés, à viser un plein temps. Ceux qui, déprimés, ne cherchent plus activement un nouveau job et sortent ainsi de toutes les statistiques.

Dans son précieux ouvrage Désinformation économique (Editions Favre), Myret Zaki citait Ekkehard Ernst: «Le taux de chômage est un concept du début du XXème siècle, créé pour les besoins de gestion de l’époque. Aujourd’hui ce taux ne veut plus dire grand-chose et fournit une vue partielle. Il faut y ajouter plusieurs indices pour avoir une vue complète du marché du travail.»

Si l’on se risquait à rapprocher les chiffres de l’assurance-invalidité et ceux de l’assurance-chômage, on aurait sans doute une vision plus réaliste des difficultés de tant de gens. Et cela, ô ironie, au moment où les entreprises se plaignent de ne pas trouver de personnel qualifié. Cherchons l’erreur.

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

6 Commentaires

@Chriscriss 20.01.2023 | 06h46

«Bonjour!
N’oublions pas non plus les plus de 55 ans: tout à fait qualifiés, expérimentés, libres d’autres engagements… dont plus aucune entreprise ne veut car ils coûtent trop cher et osent se prononcer quand quelque-chose pourrait être amélioré! Tant d’entre eux aussi, une fois en fin de droits, qui préfèrent se ‘débrouiller’ plutôt que revenir dans un monde du travail qui pressure les ‘ressources humaines’ (ce terme!), ou les placerait sous les ordres des nombreux pervers narcissiques qui prospèrent dans les rances systèmes hiérarchiques pyramidaux…
Ceci dit, je me réjouis que nos édiles réalisent un jour que la robotique et l’intelligence artificielle arrivent en force, que le monde du travail ne sera plus jamais comme avant et que d’autres systèmes financiers vont devoir être inventés (revenu de base inconditionnel, crypto-monnaies, systèmes d’échanges locaux, etc.) »


@XG 20.01.2023 | 07h34

«Les taux de chômage et d'inflation officiels ne correspondent plus à la réalité depuis fort longtemps. Il est dans l'intérêt de nos dirigeants de montrer à la population une réalité "photoshoppée" pour rester au pouvoir, faire avaler leurs décisions politiques et préserver les finances publiques (augmentation des rentes et des salaires qui ponctionnerait les bénéfices des entreprises privées et diminueraient les impôts de celles-ci). Finalement nos états démocratiques n'ont rien à envier aux régimes totalitaires. Merci à Bon Pour La Tête pour tous ces articles qui nous oxygènent le cerveau.»


@willoft 20.01.2023 | 10h38

«Il semblerait même que les entreprises n'hésitent plus à licencier leurs collaborateurs de plus de 50ans, car elles argumentent que cette "bonne" conjoncture leur permettra de retrouver plus facilement un nouveau travail!!!!»


@Spark 20.01.2023 | 22h40

«Les Entreprises se plaignent pour justifier l'importation de main-d'œuvre. 1,3 millions de personnes précaires en Suisse !»


@Erreur444 21.01.2023 | 09h55

«Bravo pour cet article! Parler « d’actifs sans emplois » en incluant les stagiaires, les working poor -au noir, les jobs à temps partiel non voulu, les épouses-mères/les personnes à l’AI/ à l’aide sociale/ les jeunes obligés de rester chez leurs parents qui cherchent activement à (re)travailler, fait grimper les statistiques du « chômage » de manière spectaculaire. »


@Boas Erez 23.01.2023 | 10h14

«A noter aussi que souvent les entreprises arrivent à convaincre les travailleurs/euses frontaliers/ères de partir avant l'âge de la retraite, en leur proposant des conditions qui sont supportables seulement à cause du coût de la vie moins élevé au-delà de la frontière. Ces "licenciements concordés" permettent ensuite d'embaucher des jeunes, qui coûtent moins cher.»


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