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Chronique

Chronique / Olivier Mathieu dit merci à toutes les filles...


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1Olivier Mathieu a été l’amant – imaginaire? – de Dawn Dunlap, l’actrice américaine découverte dans Laura, les ombres de l’été (1979), le film de David Hamilton. Ce fut son seul film et pour Olivier Mathieu, sans doute, son seul amour. Après le tournage, elle a disparu. Il ne l’a jamais retrouvée cette ravissante nymphette en celluloïd. Alors, il lui a consacré un livre: Le portrait de Dawn Dunlap. La même histoire, je l’avais vécue avec Louise Brooks et il en subsiste des traces dans l’ouvrage: Louise Brooks, portrait d’une anti-star. Cela crée des liens.

Olivier Mathieu s’est également interrogé dans quelques livres récents sur la mort de David Hamilton: suicide ou assassinat. L’enquête se poursuit. Olivier Mathieu est un teigneux qui ne lâche jamais le morceau. Par ailleurs, il écrit des romans en italien – l’Italie est son pays d’élection – et nous livre son autobiographie: Je crie à toutes filles mercis, allusion à la Ballade de merci de François Villon qui s’achève par: «Je crie à toutes gens mercis». Il ne faudrait quand même pas qu’on pense qu’Olivier Mathieu estropie le français: il le maîtrise au contraire à la perfection et en joue sur tous les registres: rabelaisien parfois, nabokovien souvent, mais toujours surprenant, comme peut l’être Henry Miller auquel il m’a fait souvent penser. Par ailleurs, il confirme – et je ne peux que l’approuver – que notre maître en mélancolie est ce cher Henri-Frédéric Amiel.

Ayant passé beaucoup de temps à tenter d’élucider l’énigme David Hamilton, il n’est guère surprenant que l’ombre de ce dernier soit omniprésente dans cette autobiographie. «David Hamilton et moi, nous aurons été des conservateurs-révolutionnaires du Sexe et de la Sensualité», écrit-il. Et, à propos du cinéma, il évoque les filles – elles sont nombreuses à avoir traversé la vie d’Olivier Mathieu: c’est son côté matznévien – qui, comme lui, se reconnaissent dans les triangles amoureux, depuis l’admirable: Adieu Philippine de Jacques Rozier jusqu’à Jules et Jim de François Truffaut, Sérénade à trois d’Ernst Lubitsch et, bien sûr, La Maman et la Putain de Jean Eustache. Par tempérament, il apparaît dans son autobiographie plus proche de Jean Eustache que de David Hamilton.

Par ailleurs, il consacre quelques pages à tordre le cou à la rumeur qui voudrait qu’il ait fréquenté dans sa jeunesse des néo-nazis. Il les vomit au contraire comme il vomit les négationnistes. Dadaïste, oui. Situationniste, oui. Mais aussi, il l’admet, une capacité hors du commun à se fourrer, en plein centre de l’agora médiatique, dans les situations les plus déplaisantes et les plus déplacées. Il en a payé le prix fort, son exécrable réputation le précédant partout.

Bref, la politique, le cinéma, le sexe constituent la toile de fond de ce livre qui est proprement inclassable – et c’est tout à son honneur. Ce qu’il en reste, ce sont les premiers slows, le 8 mars 1978, avec Véronique et Corinne. «Les instants essentiels de ma vie sentimentale ont duré cinq minutes. Ce sont ces cinq minutes-là que j’appelle ma vie», écrit encore Olivier Mathieu. Belle conclusion pour une suite de rendez-vous manqués. Mais ne le sont-ils pas tous?


1Les livres d’Olivier Mathieu peuvent être commandés sur son blog: defensededavidhamiltonblog.

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