Média indocile – nouvelle formule

# 25 août 2023

semaine n°34

Actuel

L’armée suisse en surchauffe

Jacques Pilet

Le chef de l’armée suisse, Thomas Süssli, annonce un «plan stratégique de défense» qui nécessite d’ajouter 13 milliards au budget militaire ces prochaines années. Et coopérer davantage avec l’OTAN. Un rapport du Département qui circule en Suisse alémanique parle même de 30 milliards. Quant aux experts consultés par la «Sonntagszeitung», ils évoquent un minimum de 50 milliards. Sur dix ans environ. Quelle mouche a-t-elle piqué ces galonnés?

En France on désigne l’armée sous l’appellation de «grande muette». Parce que de 1848 à 1945, les militaires n’avaient pas le droit de vote, rétabli par le général de Gaulle. L’expression vaut encore en référence à leur devoir de réserve. Ils n’ont pas le droit de prendre des positions politiques et stratégiques. Dans les démocraties, c’est le gouvernement qui est à la barre. Or les propos du dit Süssli sont clairement politiques. Il est manifestement en faveur d’un rapprochement toujours plus marqué avec l’organisation des alliés des USA qui de fait décident pour eux de la guerre et de la paix. Le président de Ruag, l’entreprise d’armement, propriété de la Confédération, Nicolas Perrin, va plus loin. Il déclare dans la NZZ que la Suisse doit urgemment décider, ou pas, d’une adhésion à l’OTAN. Il fait remarquer que les armes modernes (avions, blindés, drones, etc.) achetées en Occident sont équipées de systèmes informatiques de facto intégrés à ceux de l’alliance. Que dit le Conseil fédéral sur la question? Rien. Les va-et-vient ambigus de la Conseillère fédérale Amherd sur la réexportation des Leopard ajoutent encore à la confusion du débat non-dit. Quant aux partis de gouvernement, ils ne réagissent pas aux propos du simili-général Süssli. Effet de la chaleur ou embarras? Soumission muette aux discours concoctés à Washington? Il en va pourtant d’une interrogation sur la souveraineté même du pays. Voyons-nous notre avenir comme celui de gentils vassaux de la puissance américaine? Cette perspective ne paraît pas déplaire à la Conseillère fédérale qui fait les yeux doux à l’OTAN. Encouragée par sa main droite, Pälvi Pulli, cheffe de la Politique de sécurité, atlantiste convaincue qui a fait ses écoles dans son pays d’origine, la Finlande. Les milieux qui poussent dans ce sens invoquent des périls accrus, un paysage géopolitique nouveau depuis la guerre en Ukraine. Vieille ficelle: faire peur à l’opinion pour lui faire accepter des dépenses faramineuses. Lire la suite...


Le dessin de la semaine

« La Californie inondée »

Un dessin Valott

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