Culture

Depuis février 2022, les regards sont braqués sur l’Ukraine et la Russie. La guerre qui fait rage dans l’est de l’Europe ravive la «question russe». Elle peut être analysée de bien des manières, historiques, géopolitiques, énergétiques… Mais il faut aller plus loin pour en comprendre les enjeux sous-jacents. C’est en tout cas la thèse développée par Sébastien Boussois et Noé Morin dans leur livre intitulé La guerre sainte de Poutine. Les deux auteurs remontent aux sources historiques du millénarisme russe. Selon eux, la géopolitique classique ne tient pas assez compte des guerres spirituelles qui font rage en coulisses, dans les couloirs feutrés des chancelleries et jusque dans l’entourage du président russe. Au-delà de deux peuples slaves qui s’affrontent, ce sont deux blocs qui s’entrechoquent: l’Occident chrétien issu de la Réforme face au monde orthodoxe, derrière lequel se rangent de multiples identités, religions et groupes politiques qui s’identifient autour d’un rejet des Etats-Unis. A bien écouter le discours des autorités russes, en effet, la guerre n’est pas seulement une guerre d’annexion, mais l’accomplissement de l’unité du monde russe par la réunion des peuples slaves dans le giron de l’orthodoxie spirituelle pour lutter contre la décadence de l’Occident libéral. Une vision civilisationnelle conforme à l’analyse de Samuel Huntington sur le «choc des civilisations», qui implique que la Russie ira jusqu’au bout de son projet guerrier en Ukraine.