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Actuel / Pablo Charosky: «Lorsque je lance quelque chose, j’y crois et tant pis si ça ne marche pas»

Isabel Jan-Hess

7 août 2017

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A 25 ans, Pablo Charosky cumule les distinctions et affiche un audacieux parcours professionnel inédit. Son dernier bébé, Siradis, a remporté le prix «Baby entrepreneurs Challenge 2017». Diplômé de l’Ecole hôtelière de Lausanne, le Genevois cumule les projets entrepreneuriaux solidaires et n’a pas froid aux yeux.



Il arrive, décontracté, sur une terrasse genevoise ensoleillée, ravi de l’invitation. Non pour parler de lui, mais de son dernier bébé, une petite société d’import-export de produits alimentaires sains et locaux qu’il développe en Suisse romande. Les yeux pétillants, Pablo Charosky brûle d’impatience de raconter cette aventure, née au détour d’une conversation anodine, l’un de ces soirs où l’on se lance des défis impossibles entre copains. «J’étais encore à l’Ecole hôtelière de Lausanne, se souvient-il. Le point de départ a été un contact informel avec une représentante d’une marque de jus de fruits. Nous étions quatre en fin d’études, on s’est pris au jeu et on a lancé Siradis l’an dernier.»

Mais avant d’évoquer cette société en plein essor dont il est si fier, un détour sur le parcours incroyable de ce petit génie créatif s’impose. A 25 ans, bardé de diplômes et de belles expériences, Pablo Charosky fait mentir toutes les allégations pessimistes d’une jeunesse apathique et désœuvrée. Né à St-Gall de parents argentin et suisse, tous deux musiciens, Pablo arrive à Genève à l’âge de 4 ans. Très vite, il brûle les étapes et s’offre le luxe de sauter des années d’école. «A 5 ans, je lisais couramment mais je ne faisais rien en classe, s’amuse-t-il encore. Les enseignants n’arrivaient pas à me définir. Entre cancre ou bon élève, ils ont fini par comprendre que si je ne participais pas, c’est que je m’ennuyais.»

S’ennuyer, le mot horrifie toujours cet hyperactif. «En fait je suis un flemmard curieux. Je n’arrive pas à me motiver s’il n’y a pas au bout un défi à relever.»

Champion romand de natation junior

Las de le voir Pablo les bras croisés devant un piano, ses parents acceptent à contre cœur que leur fils renonce à la musique. Le gamin préfère le sport, la compétition. En quelques années, il devient nageur, champion romand junior. Entraînements rigoureux pour un adolescent, tiraillé parfois entre les fêtes avec les copains et les heures de piscine. «J’avais fini par m’habituer à me lever à 5h et faire mes traversées avant d’aller à l’école, sourit-il. A 18 ans j’ai arrêté, d’un coup. J’avais besoin de mettre mon énergie ailleurs.»

Un nouveau challenge se dessine rapidement. A 19 ans, il ouvre «Les Temps d’Art» avec des amis, aux Eaux-vives. Un café où l’équipe de trois passionnés offrira une scène aux groupes musicaux du cru et des murs aux artistes de la région. «C’était une belle aventure, mais au fil des mois nos vies nous ont éloignés et nous avons arrêté après trois ans.»

Difficile en effet de concilier des heures de travail de jour et de nuit avec la gestion d’un bistrot. Car après sa maturité brillamment obtenue avec un prix à l’âge de 17 ans, il vise l’Ecole hôtelière de Lausanne (EHL). Mais avant de se lancer, il opte pour deux ans de stages en emplois temporaires dans la restauration et l’hôtellerie. «Je voulais connaître tous les métiers, des plus ordinaires aux plus prestigieux, avant de m’inscrire à l’EHL. Et surtout je devais gagner ma vie pour financer mes études.»

Il collabore ainsi au «Marchand de Sable» à Carouge qu’il gère durant quelques mois, foule les cuisines du célèbre Hôtel de Ville à Crissier, où il vit la passation de pouvoir entre les deux chefs prestigieux, Philippe Rochat et Benoît Violier, accepte des petits boulots et, surtout, plonge dans les coulisses du Four Saisons Hotel Geneva. Dans ce palace, que les Genevois appellent encore l'Hôtel des Bergues, il touche à tout: bagagerie, ménage, room service. «J’étais vanné par des heures d’aspirateur, complètement décalé socialement, avec des congés les lundis et mardis.Mais c’était une expérience extraordinaire et formatrice de voir l’envers du décor.»

Accepté à l’EHL, il y travaille le management et prend rapidement la présidence du Fonds des étudiants qui gère près d’un demi millions de francs. «C’était pour moi une chance de toucher à toutes les commissions et surtout de prendre des responsabilités importantes.»

Projets d’extension

Pablo termine son cursus par un bachelor primé intitulé: «responsabilité sociale des entreprises et risques boursiers. «Je pars du postulat qu’une entreprise responsable écologiquement et socialement se prémunit d’un certain nombre de risques économiques.»

Une théorie qu’il applique aujourd’hui à «Siradis», dont il est le premier salarié. «Mon associé, Sheldon Jacquet s'apprête à me rejoindre à plein temps, afin de développer encore l’activité.»

Toujours avides de nouveaux challenges, Pablo et son compère ne se satisfont pas des gros clients privés et publics déjà séduits par leur offre de snacks ou jus garantis sans additifs et produits de manière responsable. Il y a une vraie demande aujourd’hui de produits sains, locaux et solidaires. Les gens sont plus soucieux de leur santé et cela passe par une nourriture simple et accessible.»

Les projets d’extension de sa société basée à Lausanne ne manquent pas. «Nous aimerions aider les start-up locales à développer leur offre, proposer à terme nos propres produits et toucher de nouveaux marchés.»

Jamais à court d’idées, Pablo s’est aussi acheté, à 23 ans, un appartement à Porto avec quelques copains. «Au départ, on cherchait un lieu de vacances. De fil en aiguille, on a réalisé qu’on pourrait aussi en tirer un petit bénéfice.» Les compères l’aménagent, le mettent sur le marché de la location et décident d’en acquérir d’autres. Une bonne idée. «J’entends souvent des jeunes s’emballer pour un projet, mais sans jamais le concrétiser. Moi j’y vais!»

Une petite traversée du Léman?

Une philosophie qu’il applique à toute sa vie. L’an dernier, par exemple, c’est à la nage qu’il a traversé le lac pour la Fondation internationale pour le développement humain. «J’ai lancé ça en fin de soirée à une copine qui cherchait à récolter des fonds, sans réfléchir, rigole-t-il. Le lendemain je me suis remis à nager et je l’ai fait! D’Evian à St-Prex!»

L’audace de Pablo Charosky n’a pas fini de l’élever au firmament. «Siradis» a d’ailleurs déjà été primé au concours suisse des «Baby entrepreneurs Challenge 2017», en avril dernier. «Lorsque je lance quelque chose, j’y crois et tant pis si ça ne marche pas. Tant que je vis seul, je n‘engage que moi, sans risquer plus que ce que j’ai! Je ne m’endetterai jamais de manière impulsive ou irréfléchie.»


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