Chronique / Le soir où j’ai interviewé Johnny, Sylvie et Claude (François)
Je crois bien que c’était le 17 août 1962. Je faisais un petit stage de vacances au Journal de Montreux, dirigé par Jean-Jacques Cevey. L’ex-conseiller national appréciait que je fasse des comptes-rendus des manifestations de la fanfare La Lyre et que je raconte la fête du 1er août à Clarens. Moi, du haut de mes 16 ans, je me voyais d’autres ambitions. Alors avec mon collègue Michel, plus âgé que moi et déjà stagiaire expérimenté, nous avons décidé de profiter du concert annoncé au Casino de Montreux pour en interviewer les vedettes.
Départ pour le Montreux Palace. Dans la grande salle des fêtes, voilà Johnny et Sylvie, 19 et 18 ans. Devant eux, un gâteau dégoulinant de crème dédié aux 18 ans de Sylvie avec cette inscription «Bonne anniversaire». Oui, avec deux «n et un «e». Moi, petit péteux prétentieux, je me suis dit que, bien sûr, Johnny ne maîtrisait pas l’orthographe puisqu’il n’avait guère eu l’occasion de fréquenter l’école. Je n’ai pas pensé une seconde que le pâtissier du Montreux Palace était peut-être Suisse allemand (à l’époque, ils étaient rarement Tamouls). Et d’ailleurs je n’aimais pas sa musique et encore moins ses paroles: «Kili-kili-kili watch-watch-watch…», «C’était un itsy-bitsy, teeny-winny tout petit, petit bikini…»
Bon, quand même, avec Michel on a fait notre boulot, si je me souviens bien. On a photographié le gâteau avec sa faute d’orthographe, on a posé des questions débiles et noté des réponses qui ne l’étaient pas moins.
Le soir, c’était concert. Johnny ne chantait pas. L’affiche n’annonçait que Sylvie et un certain Claude François dont je n’avais guère entendu parler, sauf que son premier super-45 tours affirmait que lui, au moins, ne se prenait pas pour un cow-boy du Tennessee. Je crois que c’était pas mal et je me souviens d’avoir bien apprécié. Claude passait en premier, en «américaine». A l’entracte, Michel et moi sommes allés le trouver dans sa loge. Moment d’émoi? La gorge sèche? Pas du tout. Moment de curiosité. Il nous a fait entrer d’une voix douce, il était en slip kangourou et câlinait deux cockers nains. On lui a posé quelques questions, on a compris que lui non plus ne venait pas du Tennessee mais d’Egypte et on est allé écrire nos textes.
Ils ont paru dans le Journal de Montreux. Le rédacteur en chef a trouvé pas mal, mais il ne m’a pas félicité autant que pour mon compte-rendu du 1er août à la place Gambetta de Clarens. Sic transit gloria (très rapidement).
VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
1 Commentaire
@markefrem 08.12.2017 | 06h57
«Délicieux, attendrissant... on se prenait pas la tête à l'époque, tout était tellement plus simple !»