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Vos lettres / Pourquoi, comme viticulteur pratiquant la viticulture biologique adaptative*, je vais voter 2 x NON aux initiatives populaires soumises au peuple le 13 juin prochain


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Leurs formulations sont ambiguës et imprécises

Pour ce qui concerne les 2 initiatives «Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse» et «Pour une eau potable propre»: il n’y a aucune définition de ce qu’est un «pesticide». Si on s’en tient à une définition stricte, par exemple pour la catégorie «pesticide de synthèse», tous les produits contenant du cuivre, base notamment des traitements «bio», pourraient être interdits car nécessitant obligatoirement un traitement industriel chimique. Aucun «pesticide» possible? Des paiements directs mais la plupart du temps peu ou pas de récolte dans nos conditions climatiques.

Leurs conséquences:

Concernant la gestion de l’enherbement:
Elles imposeront des modes de cultures irréalistes à Lavaux par exemple en interdisant tout produit, pourtant utilisé à des doses minimes et sans danger, visant à contrôler l’enherbement pour les petits talus des vignes en terrasses. Sauf à utiliser des débroussailleuses bruyantes et polluantes, blessant de surcroît les ceps. La grande majorité des vignerons, et notamment les jeunes générations font le maximum pour se passer des herbicides partout où c’est possible. Et utiliser quelques décilitres d’herbicides dans une boille à dos en ciblant les zones impossibles à atteindre autrement qu’avec ce moyen n’a rien à voir avec les épandages massifs par avion, hélicoptère ou tracteur agricole dans des grandes cultures d’OGM. Mais, comme souvent, les slogans réducteurs des activistes extrémistes ne laissent aucune place à un discours nuancé et honnêtement informatif.

Leur non-prise en compte des efforts écologiques majeurs en cours dans les traitements de protection des vignes:
Depuis les années 90, les viticulteurs ont énormément fait évoluer leurs pratiques, avec des traitements de protection, devenus souvent «bio» avec ou sans certification, ciblés en fonction de la météo et des cycles des maladies de la vigne. Mais on diabolise sans discernement tous les produits dits de synthèse, bien que certains, comme les dérivés de l’éconazole anti-oïdium par exemple soient utilisés en médecine humaine depuis 50 ans sans aucune toxicité. Alors que le cuivre, admis par les labels «bio» à des doses élevées car seul efficace contre le mildiou dans cette pratique, est un métal lourd qui s’accumule dans les sols, les cours d’eau ou les lacs. Où est la réflexion et la logique dans cet argumentaire dogmatique anti-«produit de synthèse»?

Il faut se souvenir que la Suisse, du point de vue climatique, est très différente du sud de la France ou de l’Espagne où il ne pleut que très rarement en été. Dans ces pays, le risque de maladies de la vigne y est extrêmement réduit par rapport à nos régions, soumises aux dépressions d’ouest….

Préférer le pragmatisme à l’idéologie

Ces initiatives hors des réalités locales conduiront à des baisses de rendement majeures économiquement non viables et donc à une augmentation massive des importations de produits dont la fiabilité des contrôles est souvent pour le moins discutable. Les approches culturales actuelles en Suisse, très soucieuses d’écologie, ne sont que peu connues du grand public. Cette campagne est aussi l’occasion d’en informer la population. On espère ainsi éviter une véritable catastrophe qualitative et quantitative pour l’agriculture et la viticulture suisses en cas d’acceptation de ces initiatives extrêmes et trompeuses.

Jean-Charles Estoppey,
Médecin de famille et vigneron, Cully


* https://www.terresdelavaux.ch/our-blog/2017/10/12/bio-ou-local-duel-au-pays-des-labels-4abjc

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

1 Commentaire

@Catimini 14.05.2021 | 17h27

«Je viens de lire la contribution d'un vigneron bio (demeterre) qui explique qu'il acceptera avec enthousiasme les deux initiatives...Que les avis soient différents entre producteurs bio et conventionnels, c'est assez normal, mais entre producteurs bio, c'est plus difficile à comprendre et cela ne facilite pas la prise de décisions quant à ces deux initiatives...»


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