Culture / Des lacs frontaliers du monde entier
«Frontières liquides», Daniel de Roulet, Editions Phébus, 304 pages.
«Je suis né dans cette Suisse bordée de lacs frontaliers. Le Léman est à la fois suisse et français, le lac Majeur se partage avec des riverains italiens et le lac de Constance présente aussi des berges autrichiennes et allemandes. Vivre au bord de l’un d’eux est un privilège qui me tient à distance du nationalisme…» Dans Frontières liquides, Daniel de Roulet relate ses visites à une vingtaine de lacs partagés entre plusieurs pays. Il en raconte la géographie, bien sûr, mais également l’histoire, des anecdotes. Il va au Wannsee, au bord duquel les nazis avalisèrent «la solution finale du problème juif» et où, en 1811, l’écrivain Heinrich von Kleist et son amante Henriette Vogel se suicidèrent. Il va au lac Khanka, à la frontière entre la Russie et la Chine, en compagnie d’une amie lausannoise, Fanny, une femme et une éditrice formidable – ils profitent du voyage pour visiter un ancien camp de transit vers le goulag, un camp où est mort en 1938 le poète Ossip Mandelstam. Au bord de la Mer Caspienne, Daniel de Roulet admire l’aube, «quand le soleil la fait passer du noir au bleu, offre un de ces spectacles grandioses par lequel vous est manifesté la beauté inconnue du monde». Au bord du lac Peïpsi, entre la Russie et l’Estonie, il mange un filet de perche grand comme son assiette; au bord du lac Victoria, entre la Tanzanie, l’Ouganda et le Kenya, il se souvient du terrible documentaire Le cauchemar de Darwin. En Amérique du Sud et du Nord, dans les Balkans, en Suisse… Partout où nous mène son livre, Daniel de Roulet observe – pas seulement les lacs, vous l’aurez compris – et raconte à merveille, de sa plume pudique, précise et fluide qui ne cherche pas les effets de style mais affirme un point de vue. Un point de vue d’où regarder le monde.
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