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Chronique / Diana, la princesse qui avait cassé son jouet


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La plume qui caresse ou qui pique sans tabou, c’est celle d’Isabelle Falconnier, qui s’intéresse à tout ce qui vous intéresse. La vie, l’amour, la mort, les people, le menu de ce soir.



Il y a un immense malentendu Diana que ne vient pas dissiper, demain, jeudi 31 août, l’anniversaire des vingt ans de la mort de cette figure de notre mythologie contemporaine. «Princesse des cœurs»: c’est ainsi qu’elle a été baptisée par la foule et les médias. On pense à un surnom affectueux, un cri d’amour. Mais pas du tout: si Diana a hérité de ce surnom, c’est parce qu’elle n’était pas une vraie princesse. Tout au contraire: une petite fille un peu gourde qui rêvait de devenir une princesse, qui est devenue une princesse en épousant un prince, mais qui a cassé son jouet. Ou plutôt: qui s’est rendue compte assez rapidement que le jouet en question était plus beau lorsqu’elle en rêvait, sur catalogue, dans les contes de fée. Que le jouet qu’elle avait reçu était cabossé, de deuxième main, aux défauts la poussant à mille réclamations. Mais il n’y avait pas de service après vente et de rage, elle a fracassé son jouet dans les escaliers de Buckingham. Fini, la princesse. Si c’est ça, être une princesse, non merci.

«Princesse des cœurs»? Une vraie princesse, on n’a pas besoin de rajouter «des cœurs» pour la désigner. Diana, c’est tout ce qu’elle pouvait avoir: notre cœur, notre affection, notre empathie. Parce qu’hélas pour elle qui voulait devenir une princesse, une fille spéciale donc, qui ne ressemblerait à personne, Diana ne nous ressemblait que trop.

Aussi connue, médiatique aura-t-elle été, elle n’a pas été une star, mais une simple «people». Les stars, on les admire. Ils sont doués, exceptionnels, brillants, inatteignables, en orbite autour de notre petite vie. Une star, c’est Elvis, Sinatra, Ava, Marlène.

Les «people», eux, nous ressemblent. C’est d’ailleurs pour cela que l’on veut tout savoir de leur vie – leurs régimes, leurs amours ou leurs bébés: pour se comparer. Ils sont comme nous, qui pouvons donc nous projeter dans leur vie à peine plus grande que la nôtre. Celle des stars: on n’y pense même pas. Les «people» vivent parmi nous, comme nous, presque. Les stars sont sur une autre planète.

Diana a fait tout comme nous: elle a rêvé être une princesse avec robe et diadème, est tombée amoureuse de son prince, a découvert trop tard qu’il en aimait une autre, s’est rebiffée contre l’autre, a perdu. Comme nous aurions fait, elle a voulu tout garder quand même: titre de princesse, maison, mari, enfants, mariage. Elle n’a pas réussi. Divorce, guerre contre la belle-famille, belle-maman en tête. Comme toutes les femmes blessées, elle a cafté sur l’ex-mari. Et puis s’est vengée en faisant la belle devant les hommes du monde entier. S’est vengée en sortant avec des hommes que Charles ne pouvaient que détester. S’est vengée en jouant les mères parfaites, modernes et joueuses auprès de ses fils qui semblaient du coup maltraités dans le palais de papa. S’est vengée enfin en mourant tragiquement tôt, de manière à laisser un souvenir ému au monde entier.

Au final, la preuve par les hommages qui pleuvent et l’émotion mondiale que suscite la commémoration de son décès, une excellente stratégie. La «princesse des cœurs» a vite appris à devenir une habile, une redoutable manipulatrice. La suite de ses aventures, si elle avait survécu, n’aurait, je crains, été que «peoplerie» sur «peoplerie», apparitions, rôles de faire-valoir, chasse aux bourrelets des paparazzi, amours fugaces et intéressées.

Alors «princesse des cœurs», ça sonne bien. Trois mots qui semblent valorisants, flatteurs, sympathiques, respectueux. Mais ce sont trois mots qui sous-entendent surtout que Diana n’est rien de plus, rien de moins que notre semblable, une petite gourdasse comme toutes les autres petites gourdasses qui croient au Prince Charmant quelques années de trop.

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