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Chronique

Chronique / Nouveaux caractères, dissonance cognitive et dites-lui que tout va bien


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Comme la langue, lorsqu’elle est vivante l’écriture change, se modifie, propose de nouvelles manière d’envisager le monde et parfois de nouveaux caractères d’imprimerie naissent, c’est épatant. En France, Elisabeth Badinter pourfend l’islam radical tout en gagnant de l’argent grâce à ceux qui le promeuvent. Pendant ce temps, l’ancienne politicienne vaudoise Suzette Sandoz ne veut entendre que des choses positives.



Un étudiant de la HEAD (Haute école d’art et de design), Tristan Bartolini, a inventé «plus de 40 caractère typographiques non genrés», annonce la Tribune de Genève. «Partant du constat que notre alphabet ne permet pas d’exprimer tout le spectre du genre, Tristan a imaginé des signes qui permettraient de signifier cette inclusivité et cette diversité des possibles. Les nouveaux signes qu’il propose sont un mélange graphique des lettres qui composent les terminaisons masculine et féminine», précise l’école genevoise. Ce travail vaut à l’étudiant le Prix Art Humanité 2020 de la Croix-Rouge (mais ça, on s’en fiche un peu). La typographie est une discipline à cheval entre l’art et l’artisanat, passionnante lorsqu’elle retranscrit une pensée, une culture. Au-delà du choix trivial qui nous est proposé depuis la marchandisation massive des traitements de texte, les caractères d’écriture sont à la fois sémantiques et émouvants. J’aime l’aventure intellectuelle et culturelle que nous propose l’écriture inclusive, et je trouve enivrante la naissance de nouveaux caractères, dans tous les sens du terme.           

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«Islamisme radical: "On en a assez", dit Elisabeth Badinter», relate RTL. Passons sur l’infantile «on en a assez», relevons plutôt une légère contradiction chez la «philosophe qui a évoqué sa colère après l'assassinat de Samuel Paty». A ma connaissance, madame Badinter est toujours la principale actionnaire du groupe français Publicis. Une agence de pub qui a notamment pour client l’Arabie saoudite et se charge de «soigner l'image du royaume wahhabite dans l'Hexagone sur des sujets relatifs à la politique étrangère et la défense», selon un article de 2018 du magazine Challenges. Cela veut dire que madame Badinter, tout à la fois «en a assez» de l’islamisme radical et paie sa femme de ménage avec de l’argent provenant en partie d’un pays qui, d’après le magazine Le Point, a «exporté l'islam salafiste», qui est plutôt radical. A mon avis, il s’agit là d’un cas «radical» de dissonance cognitive. Ou de cynisme.

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Suzette Sandoz, elle, n’est pas très radical. Souvenez-vous, elle n’avait pas applaudi, en 2012, la fusion de son parti, le Parti libéral, avec le Parti radical démocratique. Mais ce n’est pas de ça dont je veux vous parler. Jeudi passé, lors de l’émission Infrarouge de la RTS intitulée «Covid: le point de rupture?», elle a poussé quelques cris du cœur assez touchants. Notamment lorsque Jérôme Pugin, le médecin-chef des Soins intensifs des HUG (Hopitaux universitaires de Genève) a signalé (vers 49:00 de la vidéo), de manière assez neutre et factuelle, que la Covid-19 touchait le système nerveux central et qu’il fallait rester prudent sur les conséquences à long terme de cette maladie. «C’est exactement le genre d’information qui contribue à créer une psychose et qui est négative. (…) C’est grave», a protesté Suzette Sandoz. C’est vrai, quoi, ça suffit avec les nouvelles négatives! Tout va parfaitement bien dans le monde, non? Enfin, pourvu qu’il soit libéral. En ce sens, les témoignages négatifs du personnel soignant suisse dans Le Matin Dimanche ont dû déplaire à Suzette Sandoz. 

Comme la migraine.       

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

3 Commentaires

@Cesar 26.10.2020 | 17h46

«J’aime beaucoup votre tournure d’esprit et ne baissez pas la garde, les Diafoirus cathodiques sont en pleine exaltation en ces temps de sidération citoyenne...»


@Patrick 27.10.2020 | 06h07

«Merci!»


@PB41 01.11.2020 | 16h39

«Madame Suzette Sandoz a parfaitement le droit de faire remarquer le côté négatif de l’information donnée par Jérôme Pugin. Non seulement c’est une affirmation non documentée mais en plus elle n’apporte rien si ce n’est un sentiment de peur parmi les lecteurs. Votre critique de cette remarque de Madame Sandoz est ridicule par les termes que vous utilisez: « cris du cœur assez touchants »
Tout cela pour vilipender le « monde libéral » qui vous est tellement étranger. C’est petit.»