Lu ailleurs / Le Parlement européen déclare la guerre aux GAFA
Le journal «Les Echos» rapporte un débat majeur au Parlement européen, ignoré par la plupart des médias. La Commission prévoyait d’exiger de Facebook, Youtube et Twitter une plus grande transparence sur l’utilisation des données des utilisateurs. Les députés, engagés dans un dur combat face aux puissants représentants de la Silicon Valley à Bruxelles, veulent aller plus loin. Ils lancent deux plans complémentaires pour accroître le contrôle des géants américains du numérique: le Digital Service Act (DSA) et le Digital Market Act (DMA) qu’ils espèrent faire aboutir à la fin de l’année.
Les buts poursuivis? Exiger le retrait rapide, dans les 24 heures, des contenus jugés illicites. Et surtout interdire le ciblage publicitaire déterminés par la fréquentation des visiteurs de ces plateformes. La porte-parole du rapport parlementaire, l’eurodéputée danoise Christel Schaldemose veut éviter ce qu’elle appelle le «pistage invasif». Elle déclare: «Les géants technologiques ne doivent pas pouvoir utiliser notre comportement sur internet pour promouvoir des publicités.» C’est s’en prendre directement au modèle d’affaires de ces groupes. Ces règles s’appliqueraient aussi au système de recommandations, pour empêcher que les internautes ne soient enfermés dans des bulles de contenus et informations similaires. Enfin le Parlement veut lutter contre la fraude dans l’e-commerce. Il exige d’Amazon et autres «market place» qu’ils établissent l’identité des vendeurs et des partenaires commerciaux.
Facebook a lancé ces derniers jours une vaste contre-offensive à Bruxelles, multipliant les présentations à la presse. Elle met aussi en branle des chercheurs d’universités européennes de renom qui se montrent critiques envers ces mesures. Arguant notamment de la complexité des contrôles: «L’Europe ne deviendra pas plus compétitive en coupant les ailes des entreprises extra-européennes.»
Les attaques contre ces mastodontes partent aussi des gouvernements nationaux. En Allemagne, le Bundeskartellamt engage des procédures contre Facebook, Amazon et Google et tout récemment contre Apple. En particulier contre l’App store qui privilégie certaines offres et en met d’autres en retrait. «Ce fonctionnement, est-il affirmé, permet à Apple d’influencer à bien des égards les activités commerciales des tiers.» En France, le gouvernement vient d’annoncer que «l’autorité de la concurrence rend une décision sanctionnant Google, à hauteur de 220 millions d’euros, pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché des serveurs publicitaires pour éditeurs de sites web et d’applications mobiles.» Et même aux Etats-Unis, le temps se gâte pour les colosses. Le procureur de Washington a lancé des poursuites contre Amazon, qu’il accuse d’entrave à la concurrence dans le commerce en ligne. «Le comportement d’Amazon et sa part de marché prouvent son intention de bâtir un monopole, avec une dangereuse probabilité de succès», détaille la plainte du procureur Karl Racine. Il mentionne aussi les «commissions élevées» prélevées par la firme, «jusqu’à 40% du prix du produit».
Inutile de dire qu’en Suisse, les géants visés n’ont aucun souci à se faire. Les autorités, notamment celles qui doivent veiller à interdire les pratiques monopolistiques, ne disent pas un mot qui pourrait fâcher les grands ordonnateurs américains de nos fréquentations digitales.
VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
2 Commentaires
@Philemon 02.07.2021 | 11h49
«Bonjour M. Pilet,
A ce propos, ferez-vous un article sur la récente décision du Conseil Fédéral de choisir Ali-Baba et des GAFAMs pour stocker les données numériques des citoyennes et citoyens suisses? Lorsque sur Forum, cette semaine, le journaliste a posé la question à son interlocutrice de pourquoi une société suisse n'a pas été choisie (ni même il ne semble consultée, mais cela reste à vérifier), la ligne a été brusquement coupée et nous n'avons pu entendre la réponse. Nous avons pourtant Infomaniak (pour le Cloud), proton (pour le mail et le VPN), Threema (pour la messagerie instantanée), qui fonctionnent très bien. Si d'autres lecteurs sont intéressés par cette attitude qui consiste à favoriser les entreprises chinoises et américaines plutôt qu'helvétiques, je serais ravi de lire un article détaillé sur ce sujet dans Bon Pour La Tête. Merci d'avance.
Amitiés,
»
@stef 22.07.2021 | 20h40
«Parfaitement d'accord avec Philemon, ci-dessus »