Média indocile – nouvelle formule

Livre

Livre / De quelle vérité parlons-nous?


PARTAGER

«Le mensonge suffit», Christopher Bouix, Editions Au diable vauvert, 184 pages.



Les amateurs − les amatrices aussi − de la série télévisée Black Mirror apprécieront sans conteste ce roman qui flirte entre la réalité et la dystopie en laquelle celle-ci pourrait très rapidement se transformer. Ethan Chanseuil est convoqué pour être interrogé par un androïde doué d’intelligence artificielle. Un interrogatoire retransmis en direct sur le «méta cloud virtuel», suivi par des millions de téléspectateurs et téléspectatrices encouragés à donner leur avis, et ça va assez vite mal se passer pour Ethan, lequel n’a pas de travail et dispose d’une «valeur nette d’existence» faible, heureusement soutenue par celle de son épouse et de ses deux enfants. Ethan commence par essayer de ramener Milo, l’androïde, à sa fonction de machine, sans y parvenir: «Vous brandissez votre capacité émotionnelle comme si c’était l’unique expression de votre singularité et de votre richesse», rétorque l’androïde, ajoutant plus tard: «Moi, je suis capable de faire des choix réfléchis, de programmer des algorithmes de décision, et je ne tiens pas à la vie puisque je n’en ai pas à proprement parler. Alors que vous, pauvre monsieur Chanseuil, tout vous est dicté par des millions d’années d’évolution humaine et de patrimoine génétique, vous n’y pouvez rien. Rien n’est plus précieux à vos yeux que votre propre existence, avouez-le.» La vie de Chanseuil va être décortiquée, de son activité sexuelle à sa relation avec son beau-père ou ses enfants. Et à la fin… Le mensonge suffit est tout à la fois un thriller, un conte moderne, une métaphore, un traité sur l’existence, une critique de cette société du spectacle que Guy Debord a parfaitement décortiquée et du rôle que nous y jouons, souvent malgré nous. Guy Debord qui est d’ailleurs cité en exergue: «On n’a jamais à dire la vérité ailleurs que dans sa langue; dans celle de l’ennemi, le mensonge suffit.»       

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

0 Commentaire