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Média indocile – nouvelle formule

A vif

A vif / Les autoflingueurs de No Billag

Jacques Pilet

19 janvier 2018

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Il est assez piquant de voir les partisans d’un projet se flinguer eux-mêmes dans un débat. En attendant que la RTS ouvre enfin une large discussion sur l’avenir de la SSR, d’autres s’y mettent avec brio. L’émission d’hier soir sur la chaîne valaisanne Canal 9 était d’un excellent niveau (si l’on passe sur l’absence de toute femme!). Les défenseurs de l’initiative No Billag faisaient pitié.



Les deux poulains de l’UDC et du PLR, Jean-Philippe Gay-Fraret et David Puippe, sont de jeunes hommes comme il faut, pétris d’idéologie libérale, qui néanmoins se sont pris les pieds dans le tapis des arguments. Ils ont agité les hochets du modernisme: «il faut innover», «inventer autre chose», «tout est possible», etc. A noter au passage que le site de No Billag n’atteste guère d’une créativité époustouflante!

Inventer quoi au fait? Dès qu’on les interroge sur le concret, c’est la débâcle. Payer, en lieu et place de la SSR, une flopée d’abonnements (Netflix et compagnie)? A quel prix pour voir des films, du sport et du divertissement? Trouver des ressources publicitaires dans un marché complètement «essoré» comme le disait justement Philippe Zano (président de l’association des radio-télévisions régionales)? Tout cela ne tient évidemment pas la route.

Il y eut des moments assez drôles. Quand l’un des partisans de l’initiative, pour «faire jeune», citait comme moyen de communication politique le digital… et les SMS! Nous sommes assez bien placés, sur BPLT, pour mesurer les difficultés de créer un nouveau média dans ces espaces nouveaux. Nous y croyons, il y a d’intéressants débouchés de ce côté, mais nous ne pensons pas un instant qu’ils remplaceront les journaux et le service public de radio-télévision.

Quant à l’information régionale et suisse, assurée aujourd’hui par la SSR et des antennes locales, qui la fournira demain? Les télés étrangères? Elles s’en moquent, encaisser les spots suisses leur suffit. Une puissante TV privée ancrée à Zurich? Qui peut croire un instant que les investisseurs possibles s’intéresseront à la petite Suisse romande? Ils ont déjà bien de la peine à faire tourner Tele-Zurich. Google? Facebook? Les géants piratent les contenus des autres et pillent les ressources publicitaires, c’est tout.

Devant ces évidences, les avocats de No Billag pédalaient en marche arrière. «Mais si, mais si... Même en cas de oui à l’initiative la Confédération pourra subventionner les émissions culturelles, le romanche...» Et tant pis si le texte proposé dit le contraire.

Le conseiller national Mathias Reynard (PS), très en forme, n’eut aucune peine à mettre en déroute les deux freluquets. Avec des arguments factuels et sans les discours grandiloquents, rabâchés par ailleurs, sur la nécessité de «sauver la Suisse» et «sauver la démocratie».

Ce débat était une leçon pour la RTS. Mené avec sérénité, respect des uns et des autres, des rappels factuels, des chiffres précis. Chapeau à Frédéric Philippin (Canal 9) et Florian Barbey (Radio Chablais). Nous devrions regarder plus souvent les télévisions régionales, elles sont d’un excellent niveau. On y met moins en scène les affrontements d’idées mais on y prend le temps de faire le tour du sujet. Plusieurs autres débats sur l’initiative sont prévus à Canal 9.


L'émission sur Canal 9


VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

8 Commentaires

@Amédée 20.01.2018 | 14h02

«Complètement d'accord avec vous. Je suis impressionné par le professionnalisme et la qualité dont ont fait preuve les animateurs du débat. Et ce ne devait vraiment pas être facile pour eux. Impressionné aussi par la qualité des rares émissions que je vois à la télévision régionale et nationale et surtout par celles plus nombreuses que je suis sur Espace 2 ou la 1ère.
Et bravo et merci à "Bon pour la tête"
Maurice Dirren»


@EAbyss 21.01.2018 | 00h19

«Merci pour cette piste Mr Pilet; j'écoute radio Chablais en Valais et radio zurich en Suisse Allemande mais le DAB devrait permettre une meilleure diffusion de nos programmes "regionaux" aussi sur la route.
On oublie souvent l'auditeur automobile qui consomme ce qu'il trouve sur les ondes gratuitement au grés des vallées.
Un invité nous fait remarquer que facebook permet de nous informer et justement ce "media" a décide de reduire la part dédiée aux infos pour laisser plus de place a ses adhérents; une facon de faire monter les enchères aux annonceurs publicitaires.
Merci a BPLT

»


@cantate 21.01.2018 | 12h17

«Excellent article de Jacques Pilet, excellent débat télévisé. J'espère que le non à cette stupide initiative l'emporte- ra»


@Renaud-Louis 22.01.2018 | 21h28

«Bravo Jacques Pilet, les médias régionaux ne sont pas morts. Même s'ils peinent à survivre dans ce monde de brut. Les petits médias locaux de Bienne et de sa région sont fiers de ce qu'ils font et leurs journalistes ont l'habitude de manger de la soupe à la grimace. Cela ne les rend peut-être que plus fort, et c'est pour cela qu'on les a retrouvés à de bonne place dans des «grands médias» ou à de bonnes places. Je pense bien sûr aux anciens de BIEL BIENNE, mais aussi à de nombres anciens de Canal 3 ou de TeleBielingue que l'on retrouve à la tête de Couleur 3 ou au journal du matin de la Première. Ma première stagiaire au Bureau Cortesi il y a 25 ans s'appelait Pierrette Rey... J'ai beaucoup de plaisir à la retrouver chaque fois que le WWF se manifeste. Le CFJM refuse nos stagiaires parce que nous ne sommes pas dans la convention collective romande. Tant pis, Canal 3 et TeleBielingue les ont envoyés jusqu'à Montpellier pour qu'il puisse quand même se former. C'est paradoxal, non, à l'heure où toutes les conventions agonisent sous les coups de boutoirs des grands éditueurs (un néologisme) alémaniques. Peut-être au plaisir d'une fois en discuter. Mon collègue Momo apprécie beaucoup de collaborer avec vous tous... Moi je viens juste de m'abonner pour voir. Je reste sceptique sur le online, nous sommes tant à aimer feuilleter un journal. Quand il ne sert pas seulement à emballer des salades sur le marché. Cordialement. Renaud Jeannerat, rédacteur en chef romand, Bureau Cortesi Bienne.»


@jeremiah 23.01.2018 | 09h04

«Des informations par SMS ? C'est tellement impossible que c'est ce que la ville de Zürich fait pour certaines infos...

"Tout est possible" ? Non, rien n'est possible, la vie est impossible...

"Il faut inventer" ? Évidemment que quelqu'un va te demander ce que tu vas inventer, alors que le principe de l'invention c'est qu'on ne sait pas ce qu'on va inventer.

Les abonnements Netflix et Spotify famille à 600.-- ? moi avec les forfaits sur les sites, j'arrive à 440.-- .
Après, comparer la radio à Spotify, c'est légèrement biaisé, vu que d'un côté on se tape la Ligne du Coeur, et de l'autre on a des playlists en illimitées avec les morceaux qu'on choisit... Peut-être que la radio serait remplacé par Youtube ? Qui coute un peu moins cher ?
Et comparer la RTS avec Netflix ? Netflix c'est pas plutôt l'équivalent d'un abonnement vidéo-club ? ou cinéma ? Et surtout, pour remplacer la RTS et voir une série tous ensemble sur la télé du salon, l'abonnement à CHF 10.-- est suffisant non ?

»


@stef 26.01.2018 | 23h17

«@jeremiah: pour 30 francs par mois, je peux voir des séries ET aussi les JO ET Mise au Point ET le TJ ET 26 Minutes (enfin ça, c’etait avant »


@JeanPaul80 05.03.2018 | 00h22

«Youpie!!! L'initiative a été balayée avec plus de 70% des voix. Le service public peut donc voir venir et il doit le faire absolument.»


@Lagom 20.03.2018 | 16h39

«Dans ce même registre, il est étonnant que les propos de Mr. Rime dans INFRAROUGE avant la votation sont passés "sous silence radio" et sans aucun commentaire !!! En substance il a dit que ça ne lui plaisait pas trop que l'initiative voulait interdire toute subvention de la Confédération, mais qu'il a soutenu NO billag faute de moyen pour en lancer une autre, un peu différente !!! et il a eu l’honnêteté intellectuelle de révéler la cause réelle de son action; au fait ses 3 sociétés payent CHF 12 mille de redevance chaque année - mais il ne faut pas pleurer trop vite pour son sort - puisqu'il fait plus que 53 millions de chiffre d'affaires. Il était sur le point de mettre en difficulté des milliers d'emploi et tout l'audio-visuel Suisse pour ses malheureux 12 mille. Moi avec 53 million de CA je suis prêt à payer 3 fois plus de redevance chaque année. Ma déception de la position de Rime dans cette affaire est à la hauteur du respect que j'ai pour son courage politique. Excellent article M. Pilet !»


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