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A vif


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Face à la morosité de l’actualité, les grenouilles empaillées d’Estavayer-le-Lac représentant des scènes du quotidien offrent un peu d’autodérision. Car ne sommes-nous pas tous des petits êtres qui croassent et gobent les mouches?



Ici et là, sur les réseaux, tant et tant de propos désabusés, de ras-le-bol. Devant l’indifférence face à l’abominable tragédie de Gaza. Devant le cirque Trump. Devant la foire consumériste. Devant l’impasse des débats échauffés. Telle amie se demande dans quel pays elle respirerait mieux. Telle autre dit préférer l’Afrique ou l’Asie. Comme si l’exil, bref ou prolongé, soulageait les angoisses… 

Respect pour ces aspirations de grand large. Mais que l’on me permette une modeste piste pour sortir un instant de cette morosité: l’autodérision. Avec une excursion inattendue… à Estavayer-le-Lac. Au milieu du 19e siècle, un certain François Perrier (1813-1860), issu d’une illustre famille du lieu, après une carrière d’officier au Vatican, se prit de passion pour une technologie à la mode alors, la taxidermie. Il se mit à «empailler» des centaines de grenouilles, à les mettre en scène, tels des personnages dans des scènes familières, au bistrot, à quelque assemblée politique, errant dans la ville… Il voyait dans cet exercice une façon d’ironiser sur notre condition. Ne sommes-nous pas tous des petits êtres qui croassent et gobent les mouches? Ne nous arrive-t-il pas de «grenouiller»?

Cette curieuse démarche scientifico-philosophique, qu’on la juge farfelue ou non, est l’objet d’un musée romand, peu connu il est vrai: le Musée des Grenouilles d’Estavayer-le-lac. Au haut d’un rude escalier moyenâgeux. On y voit aussi des portraits des notables de l’époque, des armes, des canons, toutes sortes d’objets témoins du passé. Mais la mise en scène des batraciens est fort drôle. Les bestioles ont bien résisté au temps. Elles nous adressent des clins d’œil moqueurs. Qu’il est permis de juger salutaires devant certaines formes d’angoisses existentielles. 

C’est en plus l’occasion de découvrir ou revoir une vieille cité charmante. Qui connaît à ses bords un extraordinaire développement. Des quartiers nouveaux surgissent. Des entreprises s’installent. Les états d’âme tristounes n’ont manifestement pas coupé tous les élans dans cette ville où l’on a osé humaniser les grenouilles. 


Musée d'Estavayer-le-Lac et ses grenouilles

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

1 Commentaire

@Giangros 18.07.2025 | 10h16

«Merci de nous rappeler le bon sens. C´est avec plaisir que nous allons y revenir.

»


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