Culture / Théophile Gautier critique d’art
«Salons: 1844-1849», Théophile Gautier, Editions Honoré Champion, 864 pages.
Inventeur de la théorie de l’art pour l’art, dédicataire des Fleurs du mal de Baudelaire, grand voyageur, défenseur des paysagistes, dans ses Salons, Théophile Gautier vante la simplicité rustique de Corot, l’imagination débridée de Delacroix, l’audace de Théodore Rousseau, la modernité de Thomas Couture, les exploits animaliers de Rosa Bonheur et le vérisme de Courbet. Préférant au médiocre le détestable, au bourgeois le barbare, au plat l’extravagant et désirant que chacun traduise son rêve, exprime son sentiment, satisfasse son goût, s’abandonne franchement à l’inspiration, il prône l’insurrection dans le domaine de l’art. «Laissez donc souffler l’Esprit où il veut et cherchez à surprendre la nature chez elle, dans son déshabillé, arbres roses sur le bleu froid du ciel d’hiver, feuilles grillées par l’automne, squelettes de forêts, pentes rugueuses, fouillis de broussailles échevelées, mares où tremble le reflet des nuages, ravins décharnés et pour les scènes historiques, déchirez les poitrines à pleines mains, soyez violent et féroce, terrible pour nous sauver du dégoût par l’effroi et surtout épargnez-nous l’horreur cotonneuse, la tuerie mollasse, les caillots de sang en gelée de groseille», écrit-il. Pour lui, la couleur est de l’ordre du désir, du plaisir défendu et exprime le flux même de la vie. Elle s’avère donc être par excellence ce qui permet d’exprimer le langage des sentiments et les inquiétudes de l’homme moderne, son climat moral, et large et varié, son registre émotionnel. Oui, toutes les passions, tous les rêves, toutes les fièvres qui ont agité ce siècle ont traversé sa tête et fait battre son cœur et personne n’a fait de la critique plus véritablement moderne de son temps que lui.
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