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Le PRRI (Public Religion Research Institute) a publié début mars son rapport annuel, «American Values Atlas». Et le volet consacré aux droits et aux politiques relatives à la communauté LGBTQ+ interpelle. Au cours de l’année 2023, explique la directrice Melissa Deckman, l’institut a interrogé plus de 20’000 Américains, regroupés dans un panel représentatif de la société des Etats-Unis,. Pour la première fois depuis «des décennies», souligne-t-elle, on observe une baisse globale du soutien des Américains aux personnes LGBTQ+.

Le soutien au mariage entre personnes de même sexe a diminué de 2 points de pourcentage. A noter que depuis 2015, le mariage homosexuel est légal dans les 50 Etats des Etats-Unis. Le rapport note aussi une baisse de 4 points de l’approbation des lois anti discriminations, et l’opposition aux discriminations pour des raisons religieuses a quant à elle diminué de 5 points.

Après des années de hausse constante et bien documentée du soutien de l’opinion américaine aux droits des LGBTQ+, c’est la surprise. Même si les chiffres de ce «déclin» sont assez faibles, Melissa Deckman affirme qu’il ne faut pas les négliger: on aurait pu croire que la visibilité croissante des personnes homosexuelles, transgenres ou queer entraînerait la société à se montrer de plus en plus solidaire des droits de ces dernières. Or ce n’est visiblement pas si évident. Il est même possible que ce soit le contraire. Melissa Deckman déclare qu’un «backlash» est envisageable.

Une analyse détaillée des résultats apporte des éclaircissements. De grandes disparités s’observent en fonction de l’affiliation politique. Le déclin du soutien à la communauté LGBTQ+ est bien plus important chez les sympathisants républicains que chez leurs adversaires démocrates, cela n’a rien d’étonnant. L’opinion publique en général serait influencée par les leaders républicains qui donnent de la voix contre les acquis de la communauté.

La religion semble être un autre facteur explicatif, mais Melissa Deckman souligne que les personnes se déclarant religieuses, quelle que soit leur foi, ne sont pas forcément les plus conservatrices. Une communauté fait exception à cette tendance: les nationalistes chrétiens. Cette branche du christianisme, de plus en plus répandue et influente aux Etats-Unis, se concentre sur la politique intérieure et cherche à faire adopter des lois en accord avec ses dogmes et croyances. En l’occurence, les nationalistes chrétiens se montrent très opposés au mariage pour tous ainsi qu’aux lois anti discriminations.

Autre point étonnant et contre-intuitif: les jeunes, entre 18 et 29 ans, sont selon l’enquête de moins en moins solidaires des droits des LGBTQ+. 22% des jeunes aux Etats-Unis s’identifient comme LGBTQ+. Et là encore, la corrélation entre visibilité et solidarité n’est pas du tout établie. Melissa Beckman pointe un chiffre en particulier. En 2020, 64% des jeunes républicains étaient en faveur du mariage homosexuel. Ils sont désormais 49%. Les jeunes se sentant proches ou électeurs du parti républicain seraient même plus conservateurs que leurs aînés sur les questions sociétales: droits des minorités, accès à l’avortement, écologie... 

La conclusion de cette enquête, alors que 2024 pourrait voir le retour d’un Président républicain à la Maison-Blanche, est qu’il ne faut prendre aucun droit, aucune évolution, pour acquis. La révocation du mariage homosexuel n’est pas à l’ordre du jour, mais cela ne signifie pas qu’une telle évolution est inenvisageable. La Cour suprême des Etats-Unis, à majorité conservatrice, en a déjà fait montre par le passé.

L'entretien original