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Culture

Culture / Un classique du marxisme japonais

Marie Céhère

17 septembre 2021

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«Le bateau-usine», Takiji Kobayashi, Editions Allia, 96 pages.



Au mitan des années 1920, la saison de la pêche au crabe s’ouvre au large de la péninsule du Kamtchatka, au nord du Japon et à la lisière des eaux territoriales soviétiques. Mus par un patriotisme à toute épreuve, par des sentiments «anti rouges» attisés par les grands capitalistes des villes, un équipage de 400 ouvriers, pêcheurs et machinistes s’embarque sur le Hakkô-maru. Les conditions de travail et d’hygiène s’avèrent inhumaines. Dans le «merdier», le dortoir où dorment et meurent ces hommes, un brassage inattendu s’opère entre les anciens, blasés, et de jeunes étudiants arrivés là dans l’espoir de se faire un petit pécule. Comme dans Pêcheur d’Islande, la grande marine de Pierre Loti (1886), le personnage principal du Bateau-Usine est le paysage, les éléments («Le navire était devenu une grosse baleine se tordant de douleur entre les vagues en furie»). Mais ici souffle l’air du temps. Les hommes, qui n’ont pas de noms ni de visages mais des jambes changées en «gros radis blancs», se révoltent, s’unissent, se mettent en grève. Et livrent un manuel implacable du syndicalisme spontané. Près d’un siècle plus tard, le roman de Kobayashi, traduit en une dizaine de langues, est devenu un classique de la littérature prolétarienne à travers le monde et une référence pour la gauche marxiste japonaise — le dossier final de l’édition le souligne: elle existe!

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