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Actuel / Macron dégringole. Désabusés, les Français boudent la politique

Jacques Pilet

10 septembre 2018

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Les sondages sont approximatifs, mais là, ils révèlent un trou d’air. Emmanuel Macron, applaudi à ses débuts comme un phénomène novateur, ne recueille plus de 23% d’«opinions favorables». Pire que Hollande au même moment de sa présidence. Au vu de sa rentrée automnale plus que difficile, ce n’est pas très étonnant. Ce qui l’est en revanche, c’est que ses principaux opposants ne profitent pas de cette baisse. La cote de Mélenchon, Le Pen et Wauquiez stagne. Tout se passe comme si de plus en plus de Français se détournaient de tous les partis, de toutes les grandes et petites stars de la scène politique. Un ras-le-bol, une indifférence, un décrochage. Où cela mène-t-il? Vers des lendemains inquiétants.



On peut expliquer la baisse de popularité du président par une succession de pannes et de fautes. L’affaire Benalla. L’introduction hésitante de l’impôt à la source. Le placement des amis à des postes confortables. Depuis le début, des choix fiscaux en faveur des riches. Plusieurs mesures qui rognent le pouvoir d’achat des retraités ouvertement incités à «faire des efforts» au bénéfice des nouvelles générations. Si on ajoute ici et là quelques phrases malheureuses, cela fait beaucoup.

On peut aussi comprendre le désamour des Français pour l’enfant chéri d’hier à travers le parcours et le discours de celui-ci. Emmanuel Macron a tout et vite réussi. Ses études, sa vie professionnelle, son ascension politique. Il a le sentiment de tout savoir mieux que quiconque. Tout connaître… sauf l’échec. Sa rhétorique est d’une assurance absolue, confinant à l’arrogance. Ou plutôt… elle l’était. Avec la douche froide des sondages, on voit soudain son visage plus soucieux. Ses discours se font rares. Ses amis s’interrogent. Cette phase difficile peut couler sa carrière, ou au contraire lui donner un supplément d’humanité dont il bénéficiera. Même son fidèle soutien, l’ex-maire de Lyon, Gérard Collomb a appelé l’exécutif à «un peu d’humilité et plus d’écoute des Français». «En grec, il y a un mot qui s’appelle hubris, c’est la malédiction des dieux, quand, à un moment donné, vous devenez trop sûr de vous, que vous pensez que vous allez tout emporter», a mis en garde le ministre de l’intérieur, rappelant que «dans les palais de la République, on perd la capacité de lien et d’écoute avec la population.»

Quo vadis?

Mais la question la plus préoccupante n’est pas l’avenir de Macron. C’est celui de la vie politique française. Au-delà du camp présidentiel, pro-européen et réformateur, personne ne s’impose avec un programme crédible. Mélenchon est très populaire mais personne, à part les siens, ne le voit à l’Elysée. Il est trop agité, trop haineux envers l’Europe, pas clair sur l’immigration. Marine Le Pen? Elle reste haut dans les sondages mais on la sent à bout de souffle, comme l’appareil de son parti, financièrement exsangue. Wauquiez, le président des Républicains peine à s’affirmer comme tel parce que contesté dans son propre parti. Curieux phénomène: plus son discours est carré, plus on doute de ses convictions. Gagné lui aussi par «l’hubris»?

Ce tableau fait donc apparaître un grand vide. Si Emmanuel Macron échoue, ce qui adviendra après lui est totalement imprévisible. C’est dans ce genre de situations, quand une grande part de l’opinion publique devient désabusée, que surgissent des pouvoirs bizarres, à l'image de l'Italie, ou des autoritarismes insoupçonnés comme à l’est de l’Europe. 

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

4 Commentaires

@Lagom 20.09.2018 | 10h35

«Il est étonnant que les présidents français sont reçus chez nous en visite d'Etat avec tout le faste qui va avec, et quand notre Président rend visite à l'Elysée, la réunion est expédiée en une heure. Nous n'entendons jamais dans la presse que le Président français a retenu son homologue à un déjeuner ou pour une visite de musée le soir après les heures d'ouverture au public. Ce snobisme semble être une stratégie permanente de l’Administration française, et non pas le choix des locataires successifs de l'Elysée. C'est moche.»


@Bogner Shiva 212 30.09.2018 | 19h51

«Tout ! Maintenant ! Tout de suite ! Signe de l'infantilisme ambiant de personnes à la mémoire à géométrie variable . Ce Président fait exactement ce qu'il a promis lors de sa campagne...c'est ça qui dérange tant ses détracteurs, il n'y a plus rien à "détracter", plus rien d'habituel, donc il faut absolument trouver quelque chose, pt111 mer... ! Il en va de notre réputation de râleurs patentés ! Quitte à renier les motifs qui ont permis à ce Président de se faire ELIRE ! Mémoire à géométrie variable...3 quinquennats calamiteux, certains carrément miteux, qui ont mis la France à genoux dans de nombreux domaines, gestion des infrastructures, gestion des finances, gestion de l'emploi, gestion du social, gestion de la dette abyssale et j'en passe. Et en une année Mr. Macron et son équipe auraient dû TOUT ARRANGER ? Je ne crois pas qu'il ait fait ses classes à Poudlard avec Harry Potter il me semble ! Président des riches....haaaa ça ! Leitmotiv des viennent en suite, vachement loin derrière d'ailleurs question efficacité, leitmotiv destiné aux tripes du Français lambda, stade oral avancé dirais-je, question, quelle est une des principales caractéristiques de la richesse et de ses représentants et acteurs ? La mobilité ! Si on fait chi...un riche avec les mêmes considérations administratives que vous et moi en cas de litige avec votre banque, il se casse ailleurs ! Si on commence à traîter une multinationale comme Mr Glandu en retard dans le payement de ses primes d'assurance maladie elle se casse ailleurs ! La mobilité ! Donc, on soigne les relations, dussent-elles être incestueuses...Et le commerce se remets à "tourner", l'emploi se pare d'un renouveau, le taux de chômage n'a jamais été aussi bas depuis... ? Mémoire courte ... ! Et remise à l'ordre de tous les caciques politiques autoproclamés "pupilles de l'Etat" et de leurs confortables prérogatives...aussi ? Mémoire qui flanche ? Bref ce Président est un VRAI homme d'Etat, avec ce qu'il faut dans le pantalon pour l'être. à défaut de certains.
Quand à comparer un président Suisse qui ne l'est que parce qu'il a gagné au jeu des chaises tournantes entre "amis" ou sorti 1er d'un concours de circonstances avec un Président ELU par son peuple...perso je ne vois pas le rapport avec un snobisme mais plutôt pour une relation nuancée qui n'a d'importance que pour sa relative importance...»


@Eggi 30.09.2018 | 23h06

«Merci à Bogner Shiva 212, j'allais le dire, ou plutôt l'écrire. J'ajouterai que si "les journalistes" (excusez la généralisation) faisaient leur boulot, en France d'abord, mais aussi en Suisse -en tout cas à BPLT-, c'est-à-dire décrivaient des faits avant d'exposer leurs idées, les (é)lectrices et (é)lecteurs seraient mieux armés pour être "sondés" et exprimer leur opinion sur des actes politiques (réforme du contrat de travail, par exemple) plutôt que sur des faits divers (affaire Benala).»


@Lagom 05.10.2018 | 11h03

«Merci @ Bogner shiva 212 pour son dernier paragraphe, qui me réconforte dans ma conviction, que certains français sont aveuglés par une gloire, malheureusement révolue. En 1958 le Générale De Gaulle a été élu par 80 mille grand- électeurs, ce qui n'enlève en rien la grandeur de l'homme de la libération, et ne minimise pas tout ce qu'il a achevé pendant sa présidence.»


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