Média indocile – nouvelle formule

Culture

Culture / Sombrer ou se réinventer


PARTAGER

«Jacaranda», Gaël Faye, Editions Grasset, 288 pages.



Le jacaranda est un arbre dans lequel, à Kigali, aime à se réfugie Stella, une jeune Rwandaise née quelques années après le génocide de 1994, d’une mère survivante; elle y sent des choses. Mais le récit de Gaël Faye, lui-même franco-rwandais, débute en 1994, à Paris, où vit Milan, 12 ans, qui n’est pas très au courant de ce qu’il se passe dans le pays d’origine de sa mère, celle-ci n’en parlant jamais, de son passé à elle non plus. A la fin de l’été arrive chez eux un neveu du Rwanda, Claude, mutique, la tête bandée, ayant perdu ses parents dans les massacres. Milan s’y attache comme à un frère mais Claude retourne rapidement en Afrique. Le récit se poursuit ensuite en 1998, Milan accompagne sa mère au Rwanda. En 2005, Milan y retourne, puis en 2010, en 2015 et en 2020. Le lecteur est ainsi le témoin de plusieurs évolutions croisées: celle des personnages et celle de la vie dans un pays où s’est déroulé un effroyable génocide et où les victimes et les bourreaux se croisent, doivent vivre ensemble. La mère de Milan se tait, ne veut pas que son fils interroge le passé. Claude, lui, est en colère, rêve de tuer son bourreau, celui qui lui a donné un coup de machette à la tête et l'a laissé pour mort. Jacaranda est un livre dense, pas parce qu’il évoque les massacres mais parce qu’il met à nu les tourments des survivants et de leurs enfants. C’est un livre impressionnant car il montre que les douleurs secrètes peuvent être plus terribles que les blessures physiques. Chacun et chacune, dans ce livre, cherche qui il ou elle est alors que l’ordre social a été bouleversé, ravagé. Les personnages ont peu de choix: sombrer, se taire, enfouir ou se réinventer et réinventer leur relation aux autres.    


Gaël Faye sera au Livre sur les quais, à Morges, samedi 31 août et dimanche 1er septembre.

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

0 Commentaire