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Culture / Chers fantômes, il est inutile de me hanter


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«L’œil de Goliath», Diego Muzzio, Editions Phébus, 208 pages.



Le roman de Diego Muzzio parle tout à la fois de la guerre et de la folie, ce qui, convenons-en avec lui, fait sens. Il parle plus précisément de la Première Guerre mondiale et des nombreux soldats qui y ont perdu la raison, et aussi de la manière de traiter les fous. Le docteur Pierce dirige un hôpital psychiatrique en Ecosse dans les années 1920. Un éclat d’obus planté dans son crâne lui provoque de terribles migraines; il utilise l’hypnose et la psychiatrie pour soigner ses malades plutôt que les décharges électriques, la trépanation et la brutalité. Voilà qu’il doit s’occuper d’un ingénieur, David Bradley, qui semble avoir perdu la raison alors qu’il faisait l’état des lieux technique d’un phare totalement isolé au large de la Patagonie. Bradley, qui a lui aussi combattu, a tenu un journal lors de son séjour solitaire dans le phare. En le lisant, on comprend qu’il est hanté – Bradley, mais aussi le phare – par un épisode de la guerre, par la culpabilité. Le phare, vous l’aurez compris, figure la conscience humaine, laquelle est souvent entourée de brouillard, vacille sous les coups de boutoir de l’océan existentiel, est plongée dans une angoissante obscurité lorsque la luminosité de son ampoule – la morale – faiblit. L’œil de Goliath emmène habilement lecteurs et lectrices dans leurs zones d’ombre, mais sans surenchère gothique. Arrivé à la fin, il y a une petite frustration: on en aurait bien lu une cinquantaine de pages de plus. Cette impression est peut-être due à un problème rythmique, mais c’est là une affaire très technique. La question qui reste est celle-ci: comment faire comprendre à nos fantômes qu’il ne sert à rien de nous hanter?      

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