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Culture

Culture / Ceux que l’école a voulu étouffer

Patrick Morier-Genoud

1 décembre 2023

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«Le gouffre du cafard», Dunia Miralles, BSN Press, 96 pages.



L’école est une des premières grandes confrontations avec les structures idéologiques, culturelles et morales d’une société. Le livre de Dunia Miralles parle ainsi de la Suisse des années 1970, quand les pauvres et les étrangers subissaient le mépris dans un pays où le mérite était érigé en dogme: seuls ceux qui l’ont mérité sont Suisses et accèdent à l’épanouissement que procure une consommation décomplexée. Aux mythes fondateurs − Guillaume Tell et consorts – s’étaient ajoutés ceux du capitalisme comme seule source de vie désirable. Pour Concepción, c’est donc mal barré. Tant son institutrice, la sadique Madame Jaquet, que certains de ses camarades la persécutent. Comme ils persécutent Marianne, qui est pauvre, orpheline de père et doit s’occuper de ses petites sœurs plutôt que de prendre soin d’elle. En parallèle à cette triste histoire, les lecteurs et les lectrices sont invités à descendre dans un gouffre en compagnie de Rose et de Madame Krüger, dans les années 1990. La collection Uppercut de BSN Press a pour principe de mettre en scène un sport: ici, c’est la spéléo. Il faudra attendre la fin du récit pour comprendre le lien entre les deux histoires. Le gouffre du cafard présente ainsi une description en partie sociologique et une métaphore. Il y a dans toute existence des gouffres. Y descendre n’est pas sans conséquences. Le double récit de Dunia Miralles est sombre comme une grotte, celle dans laquelle tous les cancres – volontaires ou non – ont passé leur scolarité, s’aidant souvent de leur imaginaire pour échapper à l’obscurité.

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