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Actuel / Portraits de «gamers»

Jean-Claude Péclet

11 janvier 2018

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Schizophrènes. Ainsi pourrait-on qualifier les rapports qu'entretient notre société avec l'univers des «gamers». L'Organisation mondiale de la santé ne vient-elle pas d'annoncer que le «trouble du jeu vidéo» va être reconnu prochainement comme une maladie? Parallèlement, cette industrie génère plus de cent milliards de dollars par an – davantage que le cinéma – et reçoit en Suisse un soutien officiel de l'Office fédéral de la culture...



Les «gamers» sont-ils des adolescents attardés rivés à leur écran pour fuir un monde réel qui les effraie, ou des gens qui développent des compétences particulières en se faisant plaisir? Les deux représentations cohabitent. Visuellement, l’image des amateurs de jeux vidéo circulant sur le web est stéréotypée: le plus souvent, elle les présente doigts crispés sur la manette, regard hypnotisé par le halo bleuté de l’écran, une tranche de pizza à demi mangée et une canette de bière au pied du canapé.

A l’occasion du Bâloise International Gaming Show qui se tenait au Palais de Beaulieu, Lausanne, à fin novembre 2017, j’ai tenté de démythifier – ou du moins de donner une image plus neutre des «gamers». Comment procéder? Pour renouveler le point de vue, j’ai suggéré à une vingtaine d’entre eux de poser en pied, plan américain, devant un mur de béton éclairé de côté par une fenêtre aux verre dépoli. Je leur ai demandé leur prénom, leur jeu préféré et, cas échéant, le personnage qu’ils aiment y incarner (entre parenthèses dans la légende). Il en résulte les paires ci-dessous, confrontant l’être de chair, restitué avec la distance de l’image monochrome, avec son héros ou son monde virtuel favori, en couleurs généralement pétantes.

Certains sont des joueurs occasionnels, d’autres des accros. Finalement assez différents les uns des autres. J’ai été surpris par le fourmillement de néo-professionnels, à temps partiel ou complet: des clubs de football comme Sion ou Saint-Gall paient leur équipe de joueurs vidéos qui courent les tournois. Les commentateurs de ces derniers – activité qui demande à la fois une connaissance approfondie du jeu, une élocution hyper-rapide et un sens de la scène – sont parfois de vraies stars qui se produisent devant une salle comble. Il existe aussi des «influenceurs», et tous les petits métiers de communication qui gravitent autour.

Les portraits ont été réalisés avec un Rolleiflex, en format carré, pour donner une image a-temporelle de ces joueurs habitués à réagir au dixième de seconde.


Le travail de Jean-Claude Péclet est à retrouver sur son site internet.


Les portraits

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