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L’horreur du massacre des Gazaouis soulève de plus en plus d’émotion dans le monde, sinon des réactions et des sanctions gouvernementales à la mesure de ce fait historique. Cela ne doit pas nous empêcher de nous interroger froidement sur ce que veulent Israël et son allié américain au Moyen-Orient. Une stratégie qui ne date pas d’aujourd’hui.



L’ampleur des tueries de civils est sans précédent en ce siècle. Deux millions de personnes bloquées, affamées, harcelées, sur un territoire d’environ 30 km sur 12. Attirées vers des points israéliens de distribution alimentaire et visées ainsi par des tirs: mille morts de la sorte depuis le début de la manœuvre, d’une perversité jamais vue. Des dizaines d’enfants qui meurent de faim chaque jour, à quelques pas des tonnes d’aides bloquées à la frontière… Indicible.

Dans le même temps, la colonisation de la Cisjordanie s’intensifie. Des paysans chassés de leurs terres, tous les habitants soumis aux tracasseries quotidiennes, avec arrestations et heurts souvent meurtriers. Par ailleurs les Israéliens guerroient en Syrie qu’ils contrôlent en partie et continuent de bombarder sporadiquement le Liban en dépit des accords. Sans parler du conflit majeur provisoirement gelé avec l’Iran.

Devant ce tableau, hors de l’UE quasi muette, 28 pays européens, dont la Suisse, plus le Japon et l’Australie, sont sortis du silence et ont demandé simplement d’ «arrêter la guerre à Gaza». Un peu court. Il est temps de se demander à quoi rime, sur la durée, le bellicisme israélien.

Diviser pour mieux régner

Netanyahou mise depuis longtemps sur la stratégie du chaos. Diviser l’adversaire potentiel. Comme il l’a fait en permettant, des années durant, le financement du Hamas par le Qatar afin d’empêcher une entité palestinienne unie. Au Liban aussi, en faisant tout, depuis des décennies, par tous les moyens, pour exacerber les divisions intérieures de la société. Enfin le cas actuel de la Syrie est parlant. Le nouveau et fragile pouvoir installé après la chute de Bachar cherchait un accord avec Israël. Qui a feint d’entrer en matière… avant de bombarder le palais présidentiel à Damas. Toutes les factions de ce pays, druzes, alaouites, bédouines, kurdes, chiites, islamistes, se sont alors enflammées devant un gouvernement désemparé et désarmé. Le contrôle militaire du pays étant de facto israélien, turc en partie. Même démarche: il s’agit d’empêcher l’affirmation d’un Etat unifié qui pourrait un jour menacer l’Etat juif. Mieux vaut le chaos aux frontières. 

Ce concept stratégique et politique était ouvertement discuté aux Etats-Unis depuis leur guerre en Irak en 2003. Théorisé même par la secrétaire d’Etat d’alors, Condoleezza Rice. Et mis en pratique. Alors que le régime de Saddam Hussein se voulait «laïc», s’imposant aux factions religieuses, les Américains, après sa chute, valorisèrent les divers camps qui, par leurs affrontements, réduisirent l’Etat à l’impuissance. Plus généralement, l’idée centrale est de provoquer ou laisser émerger des crises et des désordres au sein d’Etats autoritaires, afin qu’en résulte un nouvel ordre régional favorable aux intérêts occidentaux. Ce qui fut fait avec succès en Syrie. 

A noter qu’en Iran aussi, grâce à l’extraordinaire pénétration de leurs services secrets, les Israéliens ont également tenté de diviser le pouvoir en place, sans y parvenir, semble-t-il, pour le moment. Avec un rêve: faire éclater le pays rival non épargné par les tensions ethniques et religieuses. Comme ailleurs d’autres bellicistes surchauffés aimeraient voir la Russie partir en morceaux.

Le revers de la stratégie

La stratégie du chaos exclut toute approche politique vers une solution des conflits par la négociation. Aucun accord véritable n’est donc en vue, ni en Syrie, ni à Gaza, ni en Cisjordanie. Vers où mène ce cap à long terme? Israël se pose aujourd’hui en vainqueur sur tous les fronts. Bien qu’après presque deux ans il n’ait pas encore totalement vaincu le Hamas. Mais le refus d’envisager un voisinage organisé et apaisé présentera, tôt ou tard, de lourds dangers. Les populations maintenues si longtemps dans diverses formes de chaos meurtrier nourrissent une haine grandissante et profonde envers Israël. Imaginons la rage au cœur des jeunes Gazaouis! Nombre d’entre eux rejoignent déjà ce qu’ils appellent la résistance. 

A l’échelle de l’histoire, au-delà des rapports de forces immédiats et changeants, les chiffres finissent par compter. Un Etat de neuf millions d’habitants (dont deux sont musulmans) ne pourra pas dominer très longtemps encore un Moyen-Orient dont les populations, par centaines de millions, lui sont hostiles. S’il veut survivre à ce siècle, il doit apprendre à décliner ce mot qu’il ne prononce plus aujourd’hui: la paix. 

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

6 Commentaires

@JoelSutter 25.07.2025 | 08h09

«La politique de Netanyahou ressemble à celle du général Custer, aux XIXe siècle aux Etats-Unis: un bon palestinien est un palestinien mort. On commence à voir quelle est sa feuille de route secrète: une Palestine à un seul état: Israël… »


@Giangros 25.07.2025 | 10h05

«Merci a BPLT et monsieur Pilet. Comment la population Israélienne et Américaine (USA) peuvent être insensible aux images horribles de la guerre et famine à Gaza ?»


@LBCH 26.07.2025 | 12h07

«Simple et succinct, mais très explicite. Bravo. Cet article dit tout en quelques mots bien choisis et quelques phrases bien formulées. D'où la force des mots... Il faut juste espérer qu'ils soient lus, entendus, compris et appliqués...»


@Fabissimo 26.07.2025 | 12h31

«Je pense humblement que la seule solution désormais, c'est la "décolonisation" par l'émigration des juifs israéliens vers les pays occidentaux...»


@RAS 26.07.2025 | 15h41

«La plupart des dirigeants juifs moderne descendent de convertis Kahzars qui ont usurpés la religion juive avec l’arrivée du judaïsme rabbinique, une structure religieuse synthétique construite pour la consolidation du pouvoir. Donc ils n’ont plus rien à voir avec les Israélites.
Les Khazars sionistes ont infiltré les systèmes dirigeant des principaux Pays. Par la corruption et le chantage sur les élus.
»


@von 26.07.2025 | 19h52

«Que faut-il montrer aux Israéliens pour qu'ils se rendent compte de ce qu'ils font?

Ils sont aveuglés et rendus quasi-hystériques par les horreurs du 7 octobre que ressassent leurs médias jour après jour depuis presque deux ans (voir la chaîne TV I24). On peut comprendre que la propagande de leur gouvernement finisse par les rendre paranos, mais ils ne sont pas tous des extrémistes fanatiques, la majorité d'entrer eux sont des gens "normaux". Ils doivent tout de même se rendre compte du mal que leur armée fait chaque jour à Gaza!

Franchement, c'est insupportable de voir ça. On ne peut pas laisser toute une population se faire anéantir ainsi! Juifs de la diaspora, de grâce, aidez-nous à faire cesser ce carnage!

Depuis notre petit Suisse, nous pourrions déjà changer de vocabulaire, manipulé par la propagande israélienne. Par exemple parler de "Palestine occupée" plutôt que de "Palestine".

Parler aussi de "Palestiniens" plutôt que de "Hamas". Ce sont bien tous les Palestiniens qui sont victimes des Israéliens, pas seulement le Hamas (l'éternelle méthode de diviser). Israël n'utilise jamais le mot "Palestiniens" dans ses messages, c'est toujours le "Hamas". De cette façon, lorsqu'il tue des gens, ce sont toujours des terroristes du Hamas (des militaires) et pas des Palestiniens (des civils). Alors qu'en fait, ses victimes sont essentiellement des civils, des enfants, des vieillards, des femmes des homme, qui ne sont pas armés. Là-aussi il faut remettre le terme adéquat à sa place.

Et puis il est urgent que la Suisse se joigne aux pays qui reconnaissent la Palestine comme pays. C'est bien le moins que le pays dépositaire des Droits Humains puisse faire non?

Pour terminer, il faut aussi sortir du qualificatif de "terroriste" dont Israël affuble les Palestiniens. D'abord tous les Palestiniens ne font pas partie du Hamas. Ensuite les Palestiniens ont le droit international pour eux, "tout pays agressé à le droit de se défendre par tous les moyens à sa disposition", c'est inscrit dans la charte des Nations Unies. Les Palestiniens ne sont pas des "terroristes" mais des "résistants".

Qui sont les terroristes (ceux qui terrorisent) dans cette histoire?

Larguer plusieurs fois le tonnage de la bombe d'Iroshima sur Gaza (un endroit d'où on ne peut sortir) n'est-il pas fait pour terroriser?
»


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