A vif / Un «Oups!», et on se marre
De toutes choses, mieux vaut en rire qu’en pleurer: depuis belles lurette, à l’enseigne du théâtre Boulimie à Lausanne, le tandem Frédéric Girard/Kaya Güner a fait sienne ce dicton qui permet d’affronter chaque cramine de novembre avec un peu moins de dépit. «Oups!», donc, leur dernière production maison, fait rire et ça tombe bien, on en a besoin. Elle est sous-titrée «La fausse histoire d’un vrai menteur», mais c’est juste parce qu’il faut bien un sous-titre: il n’y a pas vraiment d’histoire, c’est même irracontable, et tant mieux.
Dans le shaker, une pincée de burlesque, des envolées d’opérette, quelques larmes de boulevard et des litres de gaudriole. Secoué, le tout donne un spectacle rigolo comme tout, pétillant, tendre, malin, potache mais hyper pro, au rythme endiablé, réglé comme une horloge, vaguement mais agréablement ringard, parfaitement digeste bien que dégoulinant d’autodérision.
L’intrigue est simple: un professeur de chant plus bellâtre, coquet, veule et séducteur que pédagogue met en scène son propre enterrement. Autour du cercueil se pressent ses deux élèves, par ailleurs ses deux maîtresses, et leur mari respectif. À partir de là, tous les quiproquos, fantasmes et comiques de situation sont permis. Pour faire tenir le tout, pas de miracle. Il faut des génies des petits moyens mais de la grande créativité qui bougent bien, chantent, parlent, incarnent, et n’hésitent pas à se saisir d’un détail pour en fait un bon gros plat – inoubliable, la scène où Davide, s’étant pris un coup de genou bien mérité sur les attributs de son mâle entrejambe, décline les «aïe», «ouille» et autre «ay!» de toutes les ululantes manières possibles.
En tête, le baryton Davide Autieri, absolument irrésistible que ce soit en prof de chant flagorneur ou en Davide Croquette kitsch, porté par un Frédéric Girard en boucher-charcutier d’anthologie ou en cow-boy de pacotille sublimement minable, et bien sûr Kaya Güner en tout ce qu’on veut avec toujours la même facilité élastique, dont un Marlon «Parrain» Brando grotesque à souhait. Entourés des piquantes chanteuses Leana Durney et Léonie Keller et d’un orchestre live mené par Guy-François Leuenberger (que l’on trouve logiquement au sein de la troupe Comiqu’opéra avec Davide Autieri et Leana Durney), tous cabotinent avec ardeur, et talent.
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