Culture / L’enfance dans la guerre: Polanski raconte, son père aussi
«Ne courez pas! Marchez!», suivi de «Lettre à mon fils de Ryszard Polanki», Roman Polanski, Edition Flammarion, 260 pages.
«J’avais six ans et treize jours lorsque la guerre a éclaté, et douze ans à sa fin. Ce n’étaient pas les conditions matérielles, la misère et la faim, qui m’ont fait le plus souffrir à cette époque, ni même la peur. C’était l’absence de mes parents, l’existence solitaire dans un monde étrange et froid.» Roman Polanski s’est longtemps tu sur son enfance de «petit Juif» dans la Pologne occupée par les nazis. Il s’y est penché davantage en préparant son film Le pianiste et a donné alors quelques interviews. Aujourd’hui, il en tire l’essentiel, un récit resserré et pudique. Des mots simples, évocateurs, sans le moindre pathos. On songe, le lisant, aux enfants qui subissent aujourd’hui l’épreuve des guerres. Polanski a demandé un jour à son père de raconter aussi cette période, lui qui la vécut dans la fuite, puis détenu dans le terrible camp de Mathausen, au milieu des cadavres. Ce texte, rédigé à deux reprises, figure dans l’ouvrage. Et l’on découvre un homme au regard vif, non sans humour, capable de faire le portrait de ses gardiens et bourreaux, ayant tenté de dialoguer avec eux car il savait l’allemand. En cette année anniversaire de la libération des camps, voilà qui tranche avec les grands discours et les instrumentalisations politiques. Un prisonnier enfin libéré décrit l’arrivée des Russes, la déroute des Allemands, au fil des jours, au raz du quotidien, avec quelques bonnes et mauvaises surprises. Ce bref volume nourrit l’histoire sans fracas. Il se lit surtout avec le plaisir d’une écriture incisive, chez le père comme chez le fils.
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