Culture / Il y a plusieurs manières de trahir
«On a tiré sur Aragon», François Weerts, Editions du Rouergue, 448 pages.
L’histoire débute à Waterloo où, en 1965, l’écrivain Aragon vient chercher de l’inspiration. Une balle claque sur les marches de la Butte du Lion, quelqu’un lui a tiré dessus, sans le toucher. L’écrivain est rapidement exfiltré par les communistes belges qui lui servent d’escorte. Viktor Rousseau, lui, est détective privé à Bruxelles. Fils de communistes déportés pendant la guerre, il a lui aussi milité au parti avant de s’en éloigner. Pas assez cependant pour que le dit parti ne lui confie pas la tâche de trouver qui a voulu tuer le chantre du communisme vu par Moscou – c’est-à-dire très autoritaire – et de ses affidés. Et le lecteur découvre le Bruxelles des années 1960, ses militants de gauche et d’extrême droite, ses artistes, ses policiers, ses bâtiments, sa vie nocturne. Il est aussi question de la relation conflictuelle entre les écrivains communistes Louis Aragon et Paul Nizan, le premier soutenant en 1939 le pacte germano-soviétique, le second le dénonçant. L’intrigue est bien ficelée, il faut le souligner. Par contre, le roman aurait gagné à être plus resserré. Viktor raconte en long et en large tout ce qu’il boit et tout ce qu’il fume – la vieille imagerie du détective privé alcoolique et désabusé. Il nous confie longuement et obsessionnellement son attrait pour les corps féminins. Par contre, il reste très pudique sur ses vrais états d’âme – par exemple son rapport trouble avec la police – et c’est dommage. D’autant plus dommage que la trahison aurait pu être le thème principal du roman, un thème riche à explorer: trahison politique, trahison amoureuse, trahison des idéaux, des amis, etc.
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