Culture

Les adultes n’aiment pas l’enfance. Ils la considèrent comme une étape inférieure vers la vraie vie, la leur, celle des gens responsables, raisonnables, rationnels. Ils bêtifient les enfants, les éduquent, les forment à devenir comme eux, de grés ou de force. Le récit d’Andrés Barba se déroule au début des années 90, à San Cristóbal, une ville sans doute située en Amérique du Sud, proche d’une forêt qu’on imagine tropicale. Le narrateur est un fonctionnaire chargé de l’intégration des communautés indigènes. Il se souvient obsessionnellement des enfants qui soudain apparurent en ville et de leurs trente-deux cadavres alignés après des événements qu’il nous révèle petit à petit. Ces enfants ne sont pas innocents dans l'acception rousseauiste du terme. Ils parlent une langue inventée par eux et que personne ne comprend. Ils vivent selon les règles de leur groupe, hors la loi des adultes. Ils volent, ils tuent même. Certains enfants de la ville sont attirés par eux, les rejoignent. Pour les habitants de San San Cristóbal, ces jeunes «sauvages» sont dangereux, ils remettent en question l'ordre établi. Comme l’enfance, la vraie, pas celle que les adultes construisent et inventent. Ce livre en laisse entrevoir le visage.