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Analyse

Analyse / Coronavirus, ce germe liberticide

Jean-Noel Cuénod

31 juillet 2020

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On reparle un peu partout de reconfinement. L'incertitude qui se prolonge peut nous induire à sacrifier la liberté.



Plus l’été s’étend, plus le «retour à la normale» (ou à l’anormal) semble se dissoudre dans les brumes automnales. A l’évidence, la contamination n’allait pas cesser juste au moment où les autorités avaient décrété la fin du confinement. Les décrets, c’est Sa Majesté Covid XIX qui les signe et la Souveraine Incertitude qui les applique en lâchant ses germes liberticides.

Pour se limiter à l’Europe, le coronavirus repart à la hausse en France, Suisse, Espagne, Belgique, Allemagne, Autriche, Pologne et explose en Roumanie et Bulgarie. En pleine saison touristique, les contrôles se multiplient aux frontières de la plupart des pays européens. Dans la province d’Anvers, les visiteurs sont priés d’aller manger leurs moules-frites ailleurs et les habitants de les avaler à la maison; le couvre-feu y est décrété de 23h30 à 6h.

A Barcelone, phare du tourisme estival, discothèques, cinémas, théâtres sont fermés et les réunions de plus de dix personnes, interdites. Les habitants de l’agglomération doivent rester confinés, sauf déplacements strictement nécessaires. 

En Grande-Bretagne, le gouvernement a décidé de reconfiner les habitants de Leicester. En France, une semblable mesure pourrait être envisagée au moins localement à la rentrée.

La rentrée, voilà le grand mot lâché. Les vacanciers regagneront-ils leurs foyers avec un coronavirus en pleine forme dans leurs bagages? Les premiers refroidissements annonceront-ils cette Deuxième Vague tant redoutée? Le pire n’est pas sûr mais reste probable.

Coronastradamus

Nous n’en avons donc pas fini de nous colleter à cette incertitude qui nous taraude depuis février. Tous les plans sont désormais tirés sur la comète. Les agendas 2020 et 2021 restent aussi indéchiffrables qu’une série de quatrains de Nostradamus. Les projets sont caressés, puis remisés aussitôt à la niche. Nul ne sait quand il sera possible de les en retirer pour les laisser gambader. A la fin du printemps, nous espérions ne plus fouler sur les plages de l’été ces éprouvants sables mouvants. C’est raté. Nous continuons à nous enfoncer dans l’irrésolution.

Or, quand on ne sait plus à quel saint se vouer, on est tenté de se raccrocher aux basques de Satan (proverbe plouc de l’ère covidienne).

Cette difficulté, voire impossibilité de se projeter vers un avenir même proche, nous ramène à la petite enfance lorsque nous n’avions que nos parents pour boussole et horloge. Ces dieux lisaient pour nous les oracles du lendemain. Nous nous abandonnions à leurs mains qui chassaient nos angoisses comme autant de papillons noirs.

Mais ce qui est formateur pour le petit enfant qui fait apprentissage progressif de la liberté, devient destructeur pour l’adulte qui doit l’exercer de son propre chef pour vivre pleinement en état d’humanité.

L’infantilisation, l’étape initiale

L’infantilisation des femmes et des hommes est la première étape sur le chemin des dictatures. Tout régime autoritaire cherche à reproduire le schéma parental: Staline fut proclamé «petit père des peuples» par sa propagande; l’officier SS Rochus Misch disait du Führer dont il était le principal garde du corps: «Mieux que quiconque Hitler donnait cette image de père bienveillant» (J’étais le garde du corps d’Hitler, Editions Le Cherche Midi). L’archétype du Père tout-puissant, garant du vieil ordre patriarcal qui pourvoit à la nutrition et à la punition reste la figure obligée de tout régime autoritaire. 

Ce processus tyrannique murit lentement à bas bruit. Chacun cède un brin de liberté sur l’autel des états d’urgence, sans guère y prendre garde. Puis, les abdications se succèdent en s’auto-persuadant que toutes ces libertés nous serons restituées plus tard. Toujours plus tard. 

Le confort des dictatures

Fatigués par le poids des incertitudes et de toutes les frustrations qu’elles engendrent, nous nous surprenons à souhaiter ce retour à la prime enfance où tout était plus simple lorsque les Grands prenaient à notre place «les décisions qui s’imposaient». Nous sommes alors prêts à donner notre âme à la puissance autocratique qui peut s’incarner aujourd’hui dans d’autres figures que celle du Grand Chef Charismatique, comme une institution sectaire, voire les GAFAM (Google-Amazon-Facebook-Apple-Microsoft), maître de nos algorithmes et de nos décisions, sans avoir l’air d’y toucher. Il ne faut jamais sous-estimer le caractère confortable des dictatures.

Si ce climat d’incertitudes persiste, notre liberté court les plus grands dangers d’être étouffée par nous-même. Respecter les salvatrices mesures d’hygiène est une chose. Et une chose qui doit être faite. Mais accepter qu’un Etat, un dirigeant ou une application des réseaux sociaux exerce sur nous un contrôle global et quotidien, serait perdre non seulement des droits mais surtout notre humanité.

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

1 Commentaire

@Choui65 05.08.2020 | 11h08

«Ce qui permet cette montée des actions liberticides est la peur panique qu'ont réussi à transmettre les politiques et les médias. Une majorité de la population, ne s'abreuvant que des nouvelles "officielles", ne prend pas la peine de vérifier ni les chiffres de mortalité de l'OFSP qui sont très éloquents par leur normalité, ni les propos diffamatoires distribués à vau-l'eau par les médias. Nombreux sont les journalistes à avoir jeté leur esprit critique en même temps que leur intégrité aux orties pour traiter de complotiste toute personne qui ne tremblerait pas devant cette maladie virale, qui en suit et en précède des milliers d'autres. Quand ouvriront-ils les yeux pour voir que toutes les mesures prises auront des conséquences bien plus graves que celles du virus lui-même. »


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