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Un article publié sur Infosperber le 12.08.2025, traduite et adapté par Bon pour la tête

Fin 2024, les républicains et les démocrates au Congrès s'étaient mis d'accord pour interdire le service de messages courts TikTok. Ils estimaient qu'il existait un risque que les données des citoyens américains soient transmises à la société mère chinoise Bytedance et tombent ainsi entre les mains du gouvernement de Pékin.

Les médias ont fait grand cas de cette nouvelle tant la problématique leur semblait importante Mais étonnamment, personne n’a reparlé du sujet lorsque le président Trump a reporté une deuxième, puis une troisième fois le délai pour l'entrée en vigueur d'une interdiction légale de TikTok. Le 19 juin, il a prolongé de 90 jours la date à laquelle la vente des activités de TikTok aux Etats-Unis doit avoir lieu.

Les intérêts de Trump et de ses alliés

Il y a trois raisons pour lesquelles le président Trump et le Congrès américain n'ont pas encore appliqué l'interdiction: 1) Le milliardaire Jeff Yass et sa société d'investissement SIG ont fait don d'environ 50 millions de dollars à des candidats et groupes républicains lors de la campagne électorale de 2024. SIG détient environ 15 % des actions de Bytedance, la société mère de TikTok. Yass détient personnellement 7 % supplémentaires de Bytedance. 2) Aux Etats-Unis, 170 millions de personnes, principalement des jeunes, soit près des deux tiers des adolescents, utilisent TikTok. Trump avait utilisé la plateforme pendant la campagne électorale de 2024 pour mobiliser les jeunes électeurs. Il comptait lui-même des millions d'abonnés sur le réseau social. Les revendications du mouvement Make America Great Again de Trump ont trouvé un écho particulièrement favorable sur TikTok. 3) Les acheteurs américains ne s'intéressent guère à acquérir TikTok aux Etats-Unis car la société mère Bytedance ne veut pas divulguer le puissant algorithme qui est au cœur de l'application. Sans cet algorithme, Tiktok perdrait ce qui le rend attrayant pour les investisseurs.

Fondé en 2016, Tiktok est aujourd’hui devenu l'application qui connaît la croissance la plus rapide sur Internet. Cela s'explique par un algorithme étonnamment efficace qui montre aux abonnés exactement les vidéos qu'ils veulent voir. Près de deux milliards de personnes utilisent l'application dans le monde. En Chine, par contre, TikTok est interdit. Son équivalent chinois, Douyin, appartient également à Bytedance. Comme tous les réseaux sociaux, TikTok et Douyin collectent autant de données que possible sur leurs utilisateurs afin de leur proposer des publicités ciblées.

Il n'existe aucune preuve que TikTok transmette les données des utilisateurs américains et européens à sa société mère en Chine. Bytedance appartient majoritairement à des actionnaires étrangers. Cependant, comme c'est le cas pour de nombreuses autres grandes entreprises privées, des fonds souverains ou des entreprises publiques chinois détiennent 1 % d’«actions privilégiées» de Bytedance. Celles-ci leur confèrent un droit de veto sur les décisions importantes du conseil d'administration.

«Pourquoi personne ne conteste le décret de Trump qui maintient TikTok en activité?»

Selon Glenn S. Gerstell, ancien conseiller en chef de l'Agence nationale de sécurité américaine (NSA), Trump chercherait à conclure un accord. On ignore toutefois comment celui-ci pourrait garantir l'indépendance de TikTok vis-à-vis de sa société mère Bytedance. Or, c'est la condition légale pour que l'interdiction adoptée par le Congrès américain soit levée.

L'agence de presse AP s'interrogeait déjà début avril: «Pourquoi personne ne conteste le décret de Trump qui maintient TikTok en activité?» Après tout, la Cour suprême des Etats-Unis a, peu avant l’entrée en fonction de Donald Trump, que la liberté d'expression garantie par la Constitution devait céder le pas lorsque les préoccupations de sécurité nationale l'emportaient. La loi qui interdit TikTok s'il ne se sépare pas de sa société mère chinoise est conforme à la Constitution.

Les risques liés aux données de l'application TikTok ne sont pas isolés. Selon Gerstell, l'impression se répand au Congrès américain que le problème de la collecte de données est si énorme qu'une intervention serait peu efficace. Des routeurs qui enregistrent tous les sites web visités par des millions de foyers aux caméras vidéo, téléviseurs et autres appareils à l'intérieur des maisons et des entreprises, en passant par les voitures chinoises comme Volvo: partout, d'innombrables données sur les habitudes personnelles sont collectées. A cela s'ajoutent les applications de shopping populaires Temu et Shein, qui collectent également des données détaillées sur les clients américains. Toutes ces données pourraient tomber entre les mains du gouvernement chinois.

Il faut souligner que l'Agence nationale de sécurité américaine (NSA) collecte des données dans le monde entier. Elle a ainsi pu écouter les appels téléphoniques de l'ancienne chancelière allemande Angela Merkel. Des documents policiers divulgués ont montré que Tiktok partageait de nombreuses données d'utilisateurs avec les autorités judiciaires américaines. C'est ce qu'a rapporté le site d'information The Intercept en août 2020.

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