Actuel / Le jet personnel suisse de Robert Mugabe
Placé mercredi en résidence surveillée par l'armée après trente-sept ans de pouvoir, le dictateur du Zimbabwe, 93 ans, aime beaucoup voyager. Et lorsque son jet, d'une valeur de 400 millions de dollars, est en maintenance, comme en mars et en mai dernier, il loue un appareil similaire à une société basée à Kloten.
Singapour, Dubai, diverses capitales africaines et américaines, Robert Mugabe aime beaucoup voyager. Le dictateur du Zimbabwe, placé en résidence surveillée par son armée dans la nuit du 14 au 15 novembre, a dépensé 50 millions de dollars (autant en francs) l'an dernier pour ses déplacements personnels et ceux de ses ministres. C'est 250% de plus que ce que prévoyait son budget, quoi doit pourtant tenir compte de la situation catastrophique du pays, l'un des plus pauvres et les plus corrompus d'Afrique.
Lorsqu'il peut voyager, l'inamovible chef d'Etat aime se servir de son jet personnel, un Boeing 767-200 Extended Range, d'une valeur de 400 millions de dollars, l'un des plus coûteux de la planète. Et quand cet appareil est en maintenance, il en loue un autre, similaire, pour la somme d'un million de dollars par semaine. Son fournisseur est une société suisse, Comlux Aviation, dont le centre névralgique est à deux pas de la Bahnhofstrasse à Zurich et qui dispose de bureaux notamment à Hong Kong, Moscou et au Kazakhstan.
C'est ce qui s'est passé la première semaine de mars 2017. Son appareil personnel était en maintenance et il voulait se rendre dans la cité-Etat asiatique puis au Ghana. Aussi, Comlux a mis à sa disposition un appareil immatriculé P4-CLA (Aruba, Antilles néerlandaises), avec bureau présidentiel (l'appareil a transporté un autre dictateur africain cette année, le Camerounais Paul Biya), chambre à coucher présidentielle équipée d'un lit queen size, centre de communications et suffisamment de sièges pour les accompagnants. L'histoire ne dit pas s'il a voyagé cette fois avec Grace, son épouse de 53 ans, dont les prétentions à lui succéder ont justifié l'intervention des militaires. Mais il en avait parfaitement les moyens.
Robert et «Gucci Grace» Mugabe. © Reuters
Et rebelotte
L'histoire s'est répétée au printemps où le chef d'Etat s'est adressé à nouveau à Comlux pour la mise à disposition de ce même Boeing 767. Du 7 au 26 mai, deux voyages au Mexique et à Singapour sont revenus à 3,5 millions de dollars, y compris les frais de parcage de l'appareil sur un tarmac et séjour de l'équipage dans des hôtels locaux.
Robert Mugabe n'est pas le seul dirigeant autoritaire de la planète à voyager, ni même à recourir aux services de Comlux. Mais les coûts de ses déplacements choquent dans son propre pays lorsqu'ils sont comparés aux difficiles conditions de vie de ses 16 millions de concitoyens: plus de trois millions d'entre eux vivent avec moins de 1,90 dollar par jour, considéré comme le seuil de pauvreté. Le pays se classe au 154e rang mondial en terme d'indice de développement humain. Il est aussi l'un des plus corrompus de la planète, étant situé, hasard des statistiques, là aussi à la 154e place du classement tenu par l'ONG spécialisée Transparency International.
De toute évidence, Robert Mugabe préfère voyager confortablement plutôt que d'accélérer le développement de son pays. Ce qui ne l'a pas aidé, de toute évidence, à se maintenir au pouvoir.
Mugabe n'avait toujours pas l'intention hier de démissionner.
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