Culture

C’était il y a 90 ans. Début janvier 1933, un tiers de la population active en Allemagne est au chômage. La misère, la faim et la violence font des ravages. A une féroce épidémie de grippe succède une épidémie de bras tendus: le NSDAP, le parti nazi, est en passe de devenir la première force politique. Les SA et les communistes s’affrontent violemment, les assassinats sont fréquents. Les prémices du grand cataclysme, nous les connaissons dans les grandes lignes. Ce documentaire choisit de s’intéresser aux petites histoires enchâssées dans la grande: des lettres, des journaux intimes, des films et photos de famille, et pour protagonistes, des médecins, une femme au foyer, des journalistes, des diplomates... Le résultat provoque un malaise certain. Quasi unanimement, les contemporains de la conquête du pouvoir par les nazis sont plutôt satisfaits, puis ravis par la propagande; ont l’impression de vivre, au pire, «un mauvais rêve» même si «la vie continue»; disent «laisser les choses se faire». «Tout va bien pour nous, tant que nous pouvons aller au café», écrit une Berlinoise. C’est le silence des pantoufles dans des intérieurs Bauhaus, des cabarets, au soleil du doux printemps 1933 et sur les pellicules de Leni Riefenstahl. C’est l’antisémitisme à la boutonnière. On va au spectacle assister aux autodafés. Il a fallu moins d’une année à un homme pour s’arroger tous les pouvoirs et entraîner avec lui un pays entier. Ce n’était pas un mauvais rêve, c’était il y a 90 ans, c’était hier.