Culture / Les amies d’Anna sont nos amies
«Chambre d’amies», Anna Sommer, Les Cahiers Dessinés, 104 pages.
Il y a bien sûr la technique: du papier découpé. Mais laissons aux spécialistes le soin de l’expliquer, de la mettre en perspective, d’en souligner les particularités. Sans doute n’est-il pas anodin de «dessiner» avec un scalpel, un cutter. Ça donne du tranchant, c’est précis, ça fige le mouvement à l’instant précis décidé par l’artiste. Anna Sommer en est une extraordinaire, d’artiste. Ses portraits de femmes et d’hommes donnent le vertige, celui qui nous prend lorsqu’on se penche un peu trop sur nous-mêmes. Ils nous donnent à voir, ces portraits. Quoi? Qui? Nous, vous, moi, ils, elles. Tous autant que nous sommes, tout à la fois triviaux et vibrants. Il est difficile de parler des œuvres d’Anna Sommer sans parler de sensualité, de désir. De sexualité au sens où celle-ci est énergie, vie qui s’allume, se consume, s’éteint, s’allume... Dans leur chambre, les amies d’Anna racontent des histoires. Elles cueillent des magnolias avec des gants de boxe, jouent au basket en petite culotte, tatouent un dos, sonnent une cloche, mangent des cerises, boivent un coup. Perchée sur une branche, Anna déguste une poire, cheveux au vent. Il n’y a pas une seule scène où il ne se passe pas quelque chose tout à la fois d’esthétique et de physique. On sent ce que nous font ces portraits avant même d’en découvrir les détails. Vers la fin du livre, sur plusieurs pages, il y a une farandole d’embrassades. Un monde tout à la fois à venir et perdu. Ce qui pourrait être.
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