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Culture / Ils vivent de la mort


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«Une fin heureuse», Maren Uthaug, Editions Gallmeister, 416 pages.



Au début du XIXème siècle, le Danois Christian Christiansen est le seul survivant d’un naufrage dans l’océan Pacifique. Il trouve refuge sur l’île de Tikopia, et c’est ainsi que débute une saga qui va nous amener jusqu’à l’époque actuelle, la saga de huit générations de Christiansen, dont tous se prénomment Christian, sauf Lone Helle, une femme, et Nicolas, le narrateur. Des Christiansen qui vivent de la mort: ils sont croque-morts. Le roman de Maren Uthaug est formidable. Il fait bien sûr penser à la saga des Pibrac, les bourreaux de Michel Folco*, pour le fond, et il y a quelque chose de John Irving dans la forme: précision du récit, usage habile du contre-pied, de l’humour pour contrebalancer la gravité. Il est donc très difficile de résister à la tentation de lire Une fin heureuse d’une traite, et finalement, pourquoi résisterions-nous aux tentations? Le premier Christian, sur son île, se spécialise dans la mort, épouse une insulaire, devient père de Christian II, lequel quitte l’île pour une raison que l’on ne peut dévoiler ici. Christian II arrive aux Pays-Bas, où il œuvre à ce que les revenants ne reviennent pas hanter les vivants. Il y aura ensuite Christian III, qui brûle les morts à une époque où cela ne se faisait pas. Christian IV, lui, leur parle avec plus de facilité qu’aux vivants. Christian V est obnubilé par l’ordre en toute chose tandis que sa fille, Lone Helle, est dénuée de toute forme d’empathie. Nicolas, le narrateur, aime de manière inconvenante les morts, ce qui le tourmente un peu, et il s’aperçoit que son fils, Christian VI, a lui aussi une relation moralement dérangeante avec la mort. Au-delà des péripéties des Christiansen, ce roman aborde la question de la filiation, de ce que l’on se transmet génération après génération au sein d’une famille, parfois pour le meilleur mais parfois également pour le pire.

*Dieu et nous seuls pouvons, Un loup est un loup, En avant comme avant, Même le mal se fait bien, aux Editions Points

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