Culture / Flaubert, c'est chiant
«Le Salon», Oscar Lalo, Editions Plon, 160 pages.
Il y a quelque chose du fameux «effet papillon» dans ce nouveau roman d’Oscar Lalo, précédemment récompensé pour Les contes défaits et La race des orphelins. Un quasi quadragénaire apathique, qui vit comme un adolescent perfusé de séries, rencontre Flaubert, Nerval, un coiffeur visagiste fou de littérature, un libraire tout droit sorti d’un roman, et finalement, se rencontre lui-même. Le Salon, on parle ici d’un salon de coiffure aussi bien que d’un salon littéraire, presque à la mode du Grand Siècle, est une longue lettre d’amour au hasard et à la littérature. Pas celle qui porte majuscule et reliures de cuir, celle des bacs bradés à un euro, celle des vieilles éditions de poche lues et relues, aux pages volantes à force de les tourner. On y lit aussi une certaine leçon de sagesse, tantôt stoïcienne, tantôt extrême-orientale. Des discours audacieux de Florimond le libraire, qui prend sous son aile le protagoniste et lui assène que oui, «Flaubert est chiant», qu’il est normal de ne rien comprendre aux Filles du feu, que Rousseau est proche à certains égards des poètes chinois. Des introspections légères: comment devient-on soi-même, et par où commencer? A quel moment cesse-t-on de jouer un rôle pour devenir un personnage? L’épilogue lui-même, pour notre anti-héros sans prénom, est sorti de l’histoire littéraire, combinaison de Barthes et de l’ataraxie des fumeurs d’opium. Oscar Lalo a le talent des grands lecteurs, donc des grands écrivains.
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