Culture / Aventurières et exploratrices
«Les femmes aussi sont du voyage. L’émancipation par le départ», Lucie Azema, Editions Flammarion, 324 pages.
Après que j’ai annoncé mon projet de partir en voyage avec une amie, plusieurs de nos proches se sont inquiétés de nous savoir «seules» dans un pays étranger. «Seules»? Nous serons pourtant deux... Cette remarque aurait-elle eu lieu d’être si j’avais l’intention de partir avec un ami? Lucie Azema, journaliste, féministe et grande voyageuse, y répond dans cet essai particulièrement riche et malin. Des femmes voyageuses, il y en eut de tout temps. Mais force est de constater que ces exploratrices (le vocable «aventurière» méritant à lui seul un chapitre) ont dû aller à contre-courant de bien des schémas. Homme d’extérieur, femme d’intérieur, bonne mère ou mauvaise épouse, homme libre, femme en danger, flâneur et racoleuse... Forte de ses propres expériences, notamment en Iran, en Inde ou en Asie centrale, Lucie Azema parcourt la galerie des Annemarie Schwarzenbach, Ella Maillart, Jeanne Barret, Isabella Bird, sans oublier la pirate Mary Read. Elle répond avec pédagogie aux clichés sur la peur, la solitude, les corps à l'épreuve. Elle défait la légende des Pierre Loti, Stendhal, James Cook, des fantasmes de l’exotisme forcément érotique à travers les yeux de ces explorateurs. Des désirs d’ailleurs pour forcément le conquérir, avec pour point d’appui une thèse qu’elle a elle-même constatée. Le monde tel que les récits de voyages et les routes le façonnent est un monde d’hommes. Il est donc au tour des femmes, pour leur bien et le bien de tout le genre humain et de ses représentations, d’emprunter ces routes. «Seules», bien sûr.
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