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Chronique

Chronique / Pissez avant d'embarquer!

Michael Wyler

15 décembre 2017

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Payer pour ce qui était gratuit? C'est à la mode. Certes les restos ne vous font pas encore payer pour vous réserver une table près de la fenêtre ou sur la terrasse et votre dentiste ne vous taxe pas encore si vous avez besoin d'aller aux toilettes pendant les longues attentes, mais pour combien de temps encore?



Tous rêvent d'imiter le monstre culot des compagnies aériennes, qui ont découvert depuis peu qu'elles pouvaient vous vendre plein de trucs naguère gratuits et que cela leur rapportait gros. Très gros même: près de 30 milliards, oui milliards, avec neuf zéros, rien que cette année.

Ainsi, par exemple, en 2017, EasyJet, qui effectue un millier de vols par jour, encaissera près de 1,5 milliard de francs (22 % de ses revenus) en recettes dites «annexes» en vous faisant payer pour le choix de votre siège (entre 5,95 et 39,95 francs), de l'enregistrement de vos bagages (parfois plus de 50 francs par trajet), de vos skis, pour un changement de vol, de date, de nom, etc., sans parler de la nourriture et des boissons à bord.

Swiss a même poussé le bouchon plus loin, faisant non seulement payer ses sièges en classe économique, mais étant assez gonflé pour exiger de ses clients en classe Affaires jusqu'à 200 francs par trajet pour un siège dit «privacy» (soit un siège individuel). Swiss vous taxe aussi pour bloquer un tarif pendant 24 heures ou pour l'utilisation d'une carte de crédit lors de votre réservation en ligne. Et, évidemment, touche sa petite comm' si vous réservez une chambre d'hôtel ou une voiture de location en même temps que votre vol.

A quand les toilettes payantes à bord? Ne riez pas, certaines compagnies, Ryanair notamment, y songent sérieusement…

Payer pour ce que vous ne voulez pas? C'est aussi à la mode. Vous voulez lire (sic) Le Matin Dimanche? Que cela vous plaise ou pas, il vous faudra également payer pour des «produits» dont vous n'avez peut-être rien à fiche, à savoir Femina, Encore ou Télé Top Matin. C'est sans doute ce que l'on appelle le soutien individuel à la p(a)resse, et notamment au Matin Dimanche, qui en a bien besoin, ayant vu son tirage passer de 180'000 exemplaires en 2011 à 100'000 en 2017 et ayant au passage, perdu une bonne moitié de ses lecteurs.

Payer pour les autres? Cela se fait parfois au nom du principe de la solidarité (AVS par exemple). Mais c''est aussi très «mode» dans le domaine fiscal puisque quelque 93'000 ménages vaudois (24 %) tout autant de genevois (34 %) et 10'000 ménages jurassiens (33 %) sont exonérés d'impôts.

On peut évidemment renoncer à prendre l'avion. Pas pratique pour les vacances et escapades diverses. On peut aussi voyager sans bagages, ne pas réserver de siège, emporter nos propres sandwichs et une bouteille de flotte. On peut aussi renoncer au Matin Dimanche (c'est déjà plus facile). Par contre, impossible pour les célibataires et les couples dits de la «classe moyenne» de ne plus se faire tondre par les impôts.

Z'en avez pas un peu ras-le-bol parfois?

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

4 Commentaires

@Girofle 15.12.2017 | 23h29

«Bien sûr, "l'impôt" est aussi justifié par son caractère solidaire. Toutefois ses aspects de plus en plus inégalitaires choquent profondément. Les chiffres évoqués ici laissent tout de même songeur. Quant au sport lucratif et mondialisé des évasions et plus encore des hypocrites optimisations fiscales qui, contrairement aux affirmations répétées, ne sont que faiblement combattues par les Etats libéraux (et pour cause!), est une pure insulte à l'endroit du contribuable lambda. Il contribue plus fortement à la destruction de la démocratie que n'importe quelle idéologie extrémiste.
Claude Champion»


@miwy 16.12.2017 | 04h26

«100 % d'accord avec vous en ce qui concerne les dites optimisations fiscales et merci de vous être donné la peine d'écrire un commentaire.»


@Hermione 19.12.2017 | 11h52

«Payer des impôts (et j'en paye pas mal), ça ne me gêne pas - si je paye ce que je paye, c'set que je gagne bien ma vie et je crois en la solidarité. Je trouve qu'il y a un sacré amalgame dans cet article.
Par contre, payer pour aller pisser dans l'avion, ce genre de choses, ça m'énerve. En plus, juste pour rigoler, que fera le pesonnel de la compagnie aérienne face à un passager qui n'a pas l'argent/la monnaie ? Il pissera entre les sièges ?!?»


@stef 23.12.2017 | 22h41

«Payer pour les autres, par le biais de l’impôt, afin de losser les inégalités = OUI

Payer pour enrichir M. EasyJet en payant pour devoir pisser = NON (je pisserais dans une bouteille en plastique »


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