Média indocile – nouvelle formule

Actuel

Actuel / Effet «secondaire» du Covid-19, la coronaviolence


PARTAGER

Sur toute la surface de la terre, des émeutes d’intensité variable éclatent en raison des conséquences sociales, économiques, administratives et politiques qui découlent des mesures prises, ou non, pour tenter d’enrayer la contamination. Sa Majesté Covid XIX est un accélérateur d’injustices.



Pour exemples, ces quelques cas de coronaviolence tout azimut.

Blankenberge. Sur cette plage du littoral belge, une violente bagarre a tourné à l’émeute, samedi 8 août. Dépassée, la police a dû faire appel à des renforts. En tout, 120 agents ont été mobilisés pour rétablir l’ordre. L’étincelle: un groupe de jeunes a refusé de se plier aux mesures anti-Covid-19 ordonnées par les autorités (source: RTBF).

 

Amsterdam-Ibiza. Pendant le vol de la compagnie KLM reliant les deux villes vendredi matin 31 juillet, deux passagers alcoolisés refusent de porter le masque rendu obligatoire en navigation aérienne. Il s’ensuit une bagarre avec d’autres passagers. Les deux perturbateurs sont interpellés à leur descente d’avion (source: NL Times relayé par Capital et Huffington Post Info).

Plato (Magdalena). Lundi 4 mai, une manifestation tourne à l’émeute dans cette ville colombienne avec scènes de pillage et de violences entre protestataires et forces de répression. Le maire doit décréter le couvre-feu. L’étincelle: les habitants n’ont pas reçu d’aide humanitaire pour survivre malgré la quarantaine décrétée par le gouvernement colombien sur l’ensemble du pays pour endiguer la pandémie (source: W Radio qui appartient à Radio Caracol, l’un des plus importants réseaux radiophoniques de Colombie, relayée en français par le site Le Poing[1] ).

Pontevedra (Galice-Espagne). Lundi 4 mai, chargés de surveiller les restrictions de mouvement à la suite des mesures anti-Covid-19, deux policiers sont blessés à suite de jets de pierres par une vingtaine d’habitants d’un bidonville (source: le journal El Caso, relayé en français par Le Poing).

Al Abdaliyah (Koweït). Des travailleurs égyptiens en attente d’être rapatriés chez eux en raison de la pandémie sont détenus dans des abris. Excédés, ils entrent dimanche 3 mai en émeute réprimée par la Sécurité koweïtienne. Le calme revient après l’intervention de membres de l’ambassade égyptienne qui les ont rassurés quant à l’imminence de leur rapatriement (sources: Reuters et The Guardian, relayée par Le Poing ).

Trois grandes catégories de coronaviolence

Et nous pourrions multiplier les exemples en distinguant trois grandes catégories d’origine émeutière: alimentaire, administrative et carcérale.

Emeute d’origine alimentaire. Outre celle de Colombie (voir ci-dessus), citons les événements violents survenus à Murschidabad dans l’Etat indien du Bengale Occidental, dimanche 3 mai. L’économie marchant au ralenti en raison du confinement, des rations alimentaires sont distribuées. Mais certains responsables sont accusés d’en détourner une partie. Autre émeute de la faim due au confinement: dans le quartier El Bosque à Santiago du Chili, lundi 18 mai.

 

Emeute d’origine administrative. Il s’agit essentiellement de réactions violentes provoquées par le contrôle des gestes-barrière et autres restrictions à la liberté de circuler. Souvent (mais pas systématiquement), ils opposent des groupes de jeunes à des agents chargés de faire respecter les mesures sanitaires. Exemples: Mamoudzou dans l’archipel français de Mayotte (3 mai), Thiaroye au Sénégal (1er mai), Göttingen en Allemagne (21 juin), Belgrade en Serbie (8 juillet).

Emeute d’origine carcérale. La population pénale est l’une des principales victimes des mesures anti-Covid-19. Arrêt total ou partiel des visites, reports d’audience de jugement, restrictions des promenades figurent au nombre des situations aggravant des conditions d’emprisonnement déjà à la limite du supportable en temps normal. Notamment dans les pays défavorisés. Parmi les plus importantes mutineries, retenons celles survenues en Sierra Leone (prison Pademba Road à Freetown, le 29 avril), au Venezuela (prison Los Llanos à Guanare, le 1er mai), au Brésil (prison de Puraquequara à Manaus, le 2 mai) et en Argentine (prison Unidad Penal No 1 de Varones, le 3 mai).

La spirale infernale

Tout indique que Sa Majesté Covid-19 poursuivra son règne au moins pendant plusieurs mois voire années, grevant des économies déjà poussives. Les inégalités sociales et les injustices qui en découlent vont donc s’accroître transformant ceux qui sont aisés en pauvres, les pauvres en miséreux et les miséreux en affamés. Même les pays riches ne seront pas épargnés.

 A contrario, certains secteurs économiques, comme les grands groupes maîtrisant les algorithmes et les transports deviendront encore plus puissants attirant sur eux une haine collective et mondialisée.

Pour parer aux troubles sociaux qui ne manqueront pas de se multiplier et de s’aggraver, les décideurs politiques devraient mettre au point un nouvel ordre économique destiné à réduire les privilèges exorbitants d’une minuscule minorité pour faire vivre l’ensemble des populations et songer sérieusement à la création d’un revenu universel.

Hélas, la politique ne dispose plus de ces leviers de commande. Ils sont désormais manipulés par les décideurs économiques qui n’entendent aucunement restreindre leur mode de vie prédateur.

Même dans les Etats démocratiques, il ne reste qu’un levier de commande encore en main politique: le «régalien», soit la répression par les forces de l’ordre. Et c’est donc ce levier-là que les décideurs politiques enclencheront, quitte à faire ici ou là quelques actes cosmétiques sur la vie sociale ravagée.

Plus la répression augmentera en intensité, plus les réactions seront violentes au sein des peuples. De cette spirale, ce n’est pas le peuple qui sortira vainqueur, mais celui qui dispose de l’arsenal. Avec ce risque majeur: l’apparition ici et là de régimes néofascistes de type xénophobes ou néostaliniens de type chinois.

Hygiène sociale élémentaire

Nulle recette pour sortir de ce magma mais quelques mesures d’hygiène sociale élémentaire: ne rien céder à notre liberté, sauf respect des mesures sanitaires clairement identifiées comme telles; briser l’isolement par des échanges, ne serait-ce que par visioconférence; c’est cet isolement qui a détruit la classe ouvrière pour en faire une multitude d’individus taillables et corvéables à merci; débusquer les faiseurs d’infox qui enconnardisent la Toile; imaginer des actions collectives pour éviter le pire. 

Emporté par l’hubris des ultralibéraux et de leur capitalisme financier, le monde dansait la tarentelle au bord du volcan. Aujourd’hui, Sa Majesté Covid XIX pourrait bien nous y précipiter d’une chiquenaude de son sceptre infectieux.


[1] Le Poing se présente comme un «journal d’informations sur les luttes sociales à Montpellier et aux alentours et de promotion des idées révolutionnaires et anticapitalistes». Il dresse régulièrement l’état des lieux des émeutes dans le monde. Son a priori idéologique ne l’empêche pas de diffuser des informations bien sourcées, aisément contrôlables et reprises par de nombreux médias qui ne sont pas de son bord politique. Son site 

VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

1 Commentaire

@CJS 27.08.2020 | 16h25

«Enfin un journal qui dit les choses telles qu'elles sont et non telles que la version officielle les voudrait ! Le principal problème du monde actuel n'est pas l'épidémie annuelle de grippe saisonnière que l'on a baptisée "pandémie" pour mieux l'utiliser, mais l'inégalité croissante des richesses, accaparées par une infime minorité qui s'octroie le droit de gouverner le monde (et qui s'en sort plutôt bien au vu de la vénalité des rouages du pouvoir en place). Triste mais pas inéluctable.»


À lire aussi