Culture / Même les télévisions sont des métaphores
«The Crown,» saison 5, Peter Morgan, sur Netflix, 10 épisodes de 55 minutes.
La cinquième saison de la série consacrée à la famille royale britannique est disponible sur Netflix depuis début novembre. Première saison à sortir sous le règne du nouveau roi Charles III, elle couvre les années 1990. De l’avis des critiques, c'est la moins réussie. Cela tient à plusieurs éléments. D’abord, les années 1990, contrairement au début du règne d’Elisabeth II, sont proches de nous. Beaucoup les ont vécues, beaucoup ont déjà vu les images reproduites dans la série, beaucoup sont familiers des événements qu’elle retrace, non par les livres d’histoire mais par le journal télévisé. Cette décennie, sous le mandat de John Major (interprété avec talent et flegme par Jonny Lee Miller), a secoué les Windsor dans leur intimité. Le divorce long et douloureux de Charles et Diana, mais aussi ceux de la princesse Anne et du prince Andrew, donnent l’occasion de nombreuses scènes familiales où se confrontent les valeurs victoriennes et religieuses (la reine est chef de l’Eglise d’Angleterre) avec un monde qui change. Assez déprimants sont ces longs moments où l’on sent le prince Charles, quadragénaire frustré, prêt à provoquer l’abdication de sa mère pour se réaliser enfin. Le rayon de soleil, en termes de réalisation et de coup de fouet à la narration, est le personnage de Mohamed Al-Fayed, l’Antéchrist aux yeux de la famille Windsor. En sus des affaires de divorces, le fil conducteur est le démantèlement annoncé du yacht royal Britannia, auquel la reine est très attachée. Il faut vivre avec son temps, martèle-t-on à la reine, qui ne s’y résout pas. Lorsque son antique téléviseur tombe en panne et que le jeune prince William offre son aide pour la remplacer par un modèle récent donnant accès aux chaines satellites, la reine rit jaune: même les télévisions sont des métaphores de ce qu’elle considère comme le déclin de son règne. La verticalité inébranlable d’Elisabeth a traversé encore bien d’autres tempêtes. Plus la monarchie est bousculée, plus elle fait la preuve de sa raison d'être.
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